2008/08/04

Dérive économique (partie 1)

Marc Touati annonce les premiers indicateurs avancés de recession économique en Europe.
Jusqu’à ces dernières années, je remarquais ces fluctuations de l’économie sans rien y comprendre. Comme un chimpanzé au bord de la mer qui voit monter et descendre la marée, et qui ne peut que noter que le marnage est chaque jour différent. L’état de l’instruction de l’économie dans les écoles françaises ne m’y aidant guère, et absorbé par d’autres sujets, j’avais en réalité renoncé à exercer mon droit de comprendre, confiant cette activité aux prétendus spécialistes, qui ne manquaient pas d’être interviewé à chaque épisode turbulent du feuilleton économique.
Quelle profonde erreur. Cette capitulation de la volonté me condamnait à rester un chimpanzé dans le monde économique, et à laisser à d’autres le soin de comprendre à ma place, et de me dire ce qu’il fallait comprendre.
Je pouvais continuer à remarquer toutes ces années durant les conséquences désastreuses des choix économiques qui étaient pris, mais je n’étais pas capable de les critiquer en proposant une argumentation plus construite vers d’autres alternatives, remisant toujours plus loin le moment de prendre le temps de creuser la question.
J’ai repris du poil de la bête ;) au tout début 2005 en étant confronté à la bulle immobilière. Le moment de me lancer dans une acquisition immobilière avec un lourd emprunt a été un déclancheur suffisamment puissant pour que je prenne le temps de la reflexion. J’ai été rapidement fixé sur la question du marché immobilier, mais cela m’a surtout donné le coup de pouce nécessaire, accompagné par d’autres internautes et par la lecture de nombreux auteurs, pour passer de manière naturelle d’un intérêt pour ce seul marché à la macro-économie puis à la finance. C’est un exemple de maturation de la réflexion d’un groupe sur son environnement, ce que j’appelle une prise de conscience sociale.


Après ce long préambule, revenons-en justement à notre environnement économique. Pour commencer, il faut se détacher complètement des données brutes retransmises par tous les médias classiques. Savoir que telle action ou tel indice a fait +0,12% à la bourse aujourd’hui n’a aucune valeur réelle d’information. Pire, l’information est systématiquement découpée en rondelle, fragmentée à l’extrême. C’est un manège pour prétendus experts uniquement, et qui empèche toute prise de recul salutaire pour jauger une situation. Nous nous interesserons donc en premier aux historiques des valeurs.
Oui mais pour quelle valeur ? Quel indice faut’il suivre ? Pour suivre la crise en cours, il faut plusieurs indices, puisque la crise est multiple.
Concernant la crise monétaire, pour diverses raisons sur lesquelles je reviendrai dans de prochains billets, je conseille de commencer par suivre les parités Yuan / dollar, et Yuan / euro. Ca donne ceci pour la première :
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et ceci pour la seconde :
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La différence de profil saute aux yeux. Elle traduit un affaiblissement continu et important imagedu dollar par rapport aux 2 autres devises pouvant jouer un rôle de référence mondial. Ce rôle est tenu depuis Bretton-Woods par le dollar, en remplacement de la livre sterling. Mais le poids historique de cet accord de 1944 cache un nouvel ordre macroéconomique mondial appelé Bretton Woods II et mis en place de manière informelle vers 1995, et qui font de la Chine et du Japon les 2 plus gros pays détenteurs de la dette émise par le Trésor US.
Le plateau qu’on oberve pendant plus d’un mois en mai est causé par une intervention massive de la banque centrale Chinoise pour soutenir le dollar. Le semblant d’acalmie ces toutes dernieres semaines peut également s’illustrer par le tassement des cours du pétrole. Mais je pense que la tendance générale n’est ni inversée ni stabilisée. Je m’attends à ce que passé les Jeux Olympiques, fin août, la politique monétaire de la Chine soit beaucoup moins conciliante avec le dollar, et que la glissade continue de plus belle.
Autre pierre angulaire de l’édifice économique, les rehausseurs de crédit. Il n’y en a que 7 dans le monde, et la situation parle d’elle-même pour les plus gros d’entre eux :
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Non, vraiment, la crise n’est pas finie.
On se retrouve en septembre pour de nouveaux billets.

2008/07/30

Communiqué de la Plate Forme Paradis Fiscaux et Judiciaires

Attac France et 10 autres organisations ont signé un communiqué que je vous conseille de lire. Extrait de Le combat contre la finance internationale dérégulée continue:
"Les onze organisations de la Plate-forme contre les Paradis Fiscaux et Judiciaires suivaient de près les travaux de Denis Robert. Elles savent que la finance dérégulée et les paradis fiscaux et judiciaires ont de redoutables conséquences : réduction drastique des budgets des Etats, accélération des inégalités, croissance de l’économie délictuelle et de l’économie criminelle, menaces sur l’accès de nombreuses populations aux biens publics fondamentaux, et processus de développement compromis pour de nombreux pays."
Suivre cette actualité sur la délinquance et la dérégulation financière permet de mieux comprendre les raisons profondes des évènements frappants notre société.

2008/07/29

Pour comprendre l'Entreprise 2.0


Je viens de publier un billet sur les caractéristiques du mouvement vers l'Entreprise 2.0, sur le nouveau blog d'Atos Origin.

Le Cloud Computing, qui englobe le SaaS, est une des composantes de l'Entreprise 2.0, mais ce n'est pas la seule. Ce billet les met en perspective, à partir d'une précédente analyse rédigée par Christian Fauré.

Avant de partir en vacances, je posterai ici une première analyse liant l'économie actuelle et Entreprise 2.0, puisque c'est aussi le propos de ce blog :)

2008/07/23

Perl pour Google App Engine


Google a officiellement lancé un projet non-officiel ;) pour réaliser un prototype d'une application Perl sur GAE.

C'est non officiel car le projet n'est pas mené par l'équipe de GAE, donc le support de Perl n'est pas encore garanti.

La majeure partie du travail réside dans la réalisation d'un environnement d'exécution Perl extrèmement sécurisé (voir ici pour le cas de Python). On est bien loin d'un simple CGI !

La guerre dans les nuages

image Je ne sais pas si vous avez fait attention, mais on ne parle plus que du Cloud Computing ces temps-ci dans les équipes informatiques. Il s’agit en simplifié de l’utilisation des infrastructures des géants du web pour les besoins informatiques des entreprises.

La promesse semble plutôt alléchante pour ces dernières : accès immédiat, tarification à l’usage, montée en charge facilitée… j’aurais l’occasion d’y revenir dans d’autres billets, mais pour celui-ci je voudrais parler de la guerre des Plates-Formes qui se joue en coulisses.

Qu’est-ce qu’une Plate-forme tout d’abord ? C’est le Graal de tout éditeur. C’est la création d’un écosystème intégrant étroitement matériel et logiciel et qui pourra faire naître d’autres innovations tierces, d’autres solutions qui lui seront intimement liées, et dont le succès de l’un profitera à l’autre. Parmi les plates-formes d’audience mondiale, on peut citer bien sur Windows (win32, .Net), MacOS, Java, Eclipse, mais aussi iSeries, zSeries, xBox, et les consoles de Nintendo. Je n'inclue pas Linux qui n'appartient pas spécifiquement à un éditeur unique et qui ne constitue donc pas un avantage concurentiel pour un lui. La tactique avec l'utilisation de Linux réside plus dans l'abaissement de l'investissement nécessaire pour créer la partie logicielle de l'écosystème, bien plus qu'une différenciation.

Et désormais on voit surgir de nouvelles plates-formes, de nouveaux écosystèmes conçus pour une utilisation massive simultanée (the web as a platform) : Amazon Web Services, Google App Engine, Microsoft RedDog, Facebook Platform, Salesforce Force.com sont les plus connus, bien qu’ils soient loin d’être tous d’un positionnement équivalent, on y reviendra. C’est aussi l’ambition de Symbian et d’Androïd.

La valeur première d’un écosystème, c’est de créer de l’innovation, et de permettre à son éditeur de s’en saisir pour créer de la valeur. La raison d’être de la mjorité de Start-Ups est de se faire racheter par l’éditeur de la plate-forme qu’elles ont choisi comme tremplin. Ces solutions vont alors compléter l’offre de l’éditeur de rang 1, qui les font grandir en cohérence avec ses autres actifs logiciels, en assurant une diffusion commerciale à une nouvelle échelle.

C’est ce qui est en train de se passer pour Animoto, une start-up qui a basé sa solution sur les services web d’Amazon. Comme les services proposés par Amazon elle-même. Ce qui fait que lorsque Animoto sera rachetée, Amazon n’aura quasiment aucun délai pour redéployer cette solution en cohérence complète avec son catalogue existant. Un time-to-market parfait.

On peut de là penser qu’accélérer ce time-to-market est aussi un des objectifs de Google App Engine (GAE). On a vu par exemple que le rachat de Blogger s’était soldé par une année environ sans que cette solution soit hébergée sur la même plate-forme, et puisse bénéficier de l’intégration avec les autres actifs de Google. Si Blogger avait été développé directement avec GAE, ce délai aurait été très fortement réduit, et le succès de Wordpress ou SixApart sans doute amoindri.

C’est aussi pour cela que l’ouverture de GAE à un autre langage que Python, demandée à grands cris par les développeurs Java par exemple, prend du temps. Il faut que Google prenne ses dispositions afin de s’assurer de pouvoir potentiellement immédiatement maintenir les applications dans tous les langages qui seront supportés par GAE, dans le cas où ils racheteraient le futur Facebook qui serait développé sur GAE. Au vu de l’infrastructure massivement distribuée de Google, ce n’est surement pas une question triviale.

C’est donc bien une guerre de séduction des développeurs qui s’opère pour ces éditeurs. Au plus une plate-forme en capture, au plus elle accroît ses chances de faire naître en son sein un rejeton porteur de relai de croissance, au détriment de ses concurents. Et qui sera immédiatement digéré lors de l’acquisition, laquelle sera rendue bien plus difficile pour les éditeurs concurents. Les victoires de demain se préparent aujourd’hui.

C’est à cette chronique que nous allons nous intéresser au fil de nos billets, ainsi qu’à ses conséquences et liens sociaux. Comme la crise actuelle risque de brouiller les cartes de l'adoption de ces solutions, nous aurons également un oeil vigilant sur ses évolutions.