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2017/05/23

La clef de l'Histoire moderne

Diablerie de foule
[dernière mise à jour : 11/9/2017]

Cet opuscule de Pierre-Yves Lenoble donne une partie de la clef de l'Histoire moderne, en s'appuyant sur des citations très pertinentes, dont cinq que je reprends ici. Qu'il me soit permis de compléter cette clef autant que possible, c'est-à-dire par de nouvelles références et des liens vers des articles de fond sur chaque point majeur.

« Depuis la fin de la dernière guerre mondiale, une forme nouvelle de guerre est née. Appelée parfois guerre subversive ou guerre révolutionnaire, elle diffère essentiellement des guerres du passé en ce sens que la victoire n'est pas attendue uniquement du choc de deux armées sur un champ de bataille. Ce choc, qui visait autrefois à anéantir une armée ennemie en une ou plusieurs batailles, ne se produit plus. La guerre est maintenant un ensemble d'actions de toutes natures (politiques, sociales, économiques, psychologiques, armées, etc.) qui vise le renversement du pouvoir établi dans un pays et son remplacement par un autre régime. Pour y parvenir, l'assaillant s'efforce d'exploiter les tensions internes du pays attaqué, les oppositions politiques, idéologiques, sociales, religieuses, économiques, susceptibles d'avoir une influence profonde sur les populations à conquérir. »
(Roger Trinquier, La guerre moderne, Ed. La table ronde, 1961, Pp.15)


« Aujourd'hui, on ne conquiert plus le terrain pour avoir les hommes, on conquiert les âmes, on conquiert le psychisme. Une fois qu'on a le psychisme, on a l'homme. Quand on a l'homme, le terrain suit. La plus grande astuce du diable, c'est de faire croire qu'il n'existe pas. Le moment est venu d'utiliser le mot "subversion". Arme redoutable car elle essaie de ne pas se montrer. [...] Cette méthode redoutable s'inscrit dans l'infiltration d'une partie des médias, d'une partie de ceux qui enseignent aux âmes, aux cœurs et aux cervelles, je veux dire le clergé, l'école, l'Université. Jadis, pour tenir le pouvoir il fallait contrôler l'Eglise, donc les âmes ; au XIXe siècle, c'est l'instruction, donc les cerveaux. Aujourd'hui c'est l'audiovisuel qui prime, et l'Université. En Occident, on n'apprend plus, comme on le fait dans les pays de l'Est, l'amour de la patrie, du travail, mais le laxisme, l'indiscipline, le non-respect des vertus anciennes, la recherche des paradis artificiels. En un mot ce que j'appelle "l'ordre inverse". »
(Alexandre de Marenches, Dans le secret des princes, Ed. Stock, 1986, Pp. 376-377)


« La Révolution française a été la première révolution de la classe bourgeoise et moyenne ; de ce que l’on appelait le Tiers-Etat, dans l’histoire.
La Commune de Paris devait être la première révolution de la classe prolétarienne, restée relativement dans l’ombre jusqu’à cette époque. Elle fut la première réalisation dans l’histoire - essai encore éphémère et précipitamment étouffé - de la dictature du prolétariat, forme jusque-là inédite de la subversion.
Elle fut le premier avènement du Quart-Etat, ce qui était un progrès sur tout ce qui avait précédé. A ce titre, elle marqua une date dans l’évolution des procédés employés par l’esprit de révolte. Tous les pontifes de la subversion contemporaine, de la phase dite socialiste et communiste, furent unanimes à le déclarer. Les plus grands en tête, Marx et Lénine, répudiaient avec ostentation toute attache avec les révolutions bourgeoises, républicaines et démocratiques, du type de 1789 et 1848. Ils n’y voyaient qu’un moyen, un acheminement, non le but. Tous proclamaient leur filiation directe à l’égard de la Commune parisienne, même lorsqu’ils en critiquaient le manque de préparation technique.
Tous, sans exceptions s’inclinent devant elle comme devant une sorte de chef de file et lui consacrent de nombreux discours, brochures et livres. Elle a été le premier son de cloche de ce que devait être la révolution bolcheviste. Marx, Lénine, Trotsky, Kautsky, Lawrof et beaucoup d’autres traitent ce sujet et polémiquent sous ce rapport.
La grande erreur consiste à supposer que la Commune de Paris fut un mouvement spontané, et cette erreur se répète à propos de toutes les révolutions.
Chaque fois, il se trouve des hommes, par centaines de milliers, assez naïfs pour croire qu’une chose peut se faire toute seule, et qu’elle peut sortir du néant sans avoir été faite par quelqu’un. Pour peu qu’on y réfléchisse c’est une absurdité philosophique et un défi au bon sens. Surtout à une époque qui prétend être scientifique et où l’on devrait savoir que même ces processus qu’autrefois on croyait automatiques et réglés par des lois abstraites de la nature, - tels que la décomposition d’un cadavre, la maladie, la vieillesse, la mort dite naturelle - , sont déterminés par des agents concrets et vivants, appelés bacilles, toxines, qui travaillent à cet effet. Sans eux il n’y aurait ni décomposition, ni fièvre, ni décrépitude, ni mort, et si ces agents nous sont invisibles, cela ne veut pas dire qu’ils soient moins réels.
Il en est de même pour la société, qui est l’humanité dans l’espace, et pour l’histoire, qui est l’humanité dans le temps.
Des bacilles, des toxines, à forme humaine, que l’œil des générations ne discerne pas, que l’œil des historiens ignore, ou plus souvent, feint d’ignorer, - mais dont l’existence n’est pas un mystère pour le bactériologiste de la société et de l’histoire - , provoquent les fièvres, la décrépitude ou la décomposition, les paralysies ou les convulsions, la vieillesse, l’avarie et la mort.
Les victimes croient que le processus se fait tout seul, en vertu des lois inéluctables et consubstantielles à la nature des choses, et c’est pourquoi elles ne réagissent point. En effet, comment réagir, sans être insensé, contre l’inéluctable et la nature des choses ?...
Il n’y a pas eu plus de spontanéité dans la Commune de 1871 qu’il n’y en avait eu en 1789, en 1793, en 1848, en 1905 ou en 1917 et qu’il n’y en a dans les troubles chinois, hindous, soudanais, syriens, turcs, marocains et afghans. Il n’y en a pas davantage dans toutes les grèves de notre époque. Il n’en est pas moins vrai que, de même que dans l’organisme animal, pour que les bacilles et les toxines puissent manifester efficacement leur action meurtrière, il est nécessaire que cet organisme soit affaibli et délabré par des intempéries ou du surmenage. Sans quoi, cet organisme sain et dans la plénitude de ses forces, aurait des ressorts pour se défendre et réduire à néant l’action nocive. »
(Emmanuel Malynski et Léon de Poncins, La guerre occulte, édition de 1940, Pp.19-20 ; cette partie est un résumé par de Poncins de La mission du peuple de Dieu - 6ème partie - La grande conspiration mondiale, 1928)


« Maniement de l'opinion publique
52 - A cela s'ajoute ce qui se révélait déjà dans l'évolution antérieure mais qui, à présent, se découvre à plein : la mise au pas uniforme de l'opinion publique. Et cela par tous les moyens : par la parole et par l'écrit, par la presse et le théâtre, par le cinéma et la radio, par l'art et même par la science, par l'école et les métiers, et encore, trait répugnant, par la pression, au moyen des œuvres d'assistance, sur les pauvres. Et de tout cela, voilà le lamentable résultat : l'homme de masse moderne. Celui-ci n'a plus d'opinion à lui, plus de volonté propre ; il n'est qu'un instrument passif aux mains du chef. Prendre n'importe quelle initiative un tant soit peu en vue lui est pratiquement impossible ; et pourtant, sans cet esprit d'initiative, impossible à l'homme de se donner cette culture personnelle qui est un élément de vie pour la communauté humaine. »
(Humani Generis Unitas. Pope Pius XI - Ineditum, 1938, §52 ; in Georges Passelecq, Bernard Suchecky, L'Encyclique cachée de Pie XI, Ed. La Découverte, 1995, Pp. 242-243)

Quelques explications métaphysiques


Ici comme dans les précédents ouvrages de M. Léon de Poncins dont nous avons déjà eu l’occasion de parler, il y a, pour tout ce qui se rapporte à la critique du monde moderne, beaucoup de considérations très justes ; les auteurs, qui dénoncent avec raison des erreurs communes comme celle qui consiste à croire que les révolutions sont des « mouvements spontanés », sont de ceux qui pensent que la déviation moderne, dont ils étudient plus spécialement les étapes au cours du XIXème siècle, doit nécessairement répondre à un « plan » bien arrêté, et conscient tout au moins chez ceux qui dirigent cette « guerre occulte » contre tout ce qui présente un caractère traditionnel, intellectuellement ou socialement. Seulement, quand il s’agit de rechercher des « responsabilités », nous avons bien des réserves à faire ; la chose n’est d’ailleurs pas si simple ni si facile, il faut bien le reconnaître, puisque, par définition même, ce dont il s’agit ne se montre pas au dehors, et que les pseudo-dirigeants apparents n’en sont que des instruments plus ou moins inconscients. En tout cas, il y a ici une tendance à exagérer considérablement le rôle attribué aux Juifs, jusqu’à supposer que ce sont eux-seuls qui en définitive mènent le monde, et sans faire à leur sujet certaines distinctions nécessaires ; comment ne s’aperçoit-on pas, par exemple, que ceux qui prennent une part active à certains événements ne sont que des Juifs entièrement détachés de leur propre tradition, et qui, comme il arrive toujours en pareil cas, n’ont guère gardé que les défauts de leur race et les mauvais côtés de sa mentalité particulière ? Il y a pourtant des passages (notamment pp. 105-110) qui touchent d’assez près à certaines vérités concernant la « contre-initiation » : il est tout à fait exact qu’il ne s’agit pas là d’ « intérêts » quelconques, qui ne peuvent servir qu’à mouvoir de vulgaires instruments, mais d’une « foi » qui constitue « un mystère métapsychique insondable pour l’intelligence même élevée de l’homme ordinaire » ; et il ne l’est pas moins qu’ « il y a un courant de satanisme dans l’histoire »… Mais ce courant n’est pas seulement dirigé contre le Christianisme (et c’est peut-être cette façon trop restreinte d’envisager les choses qui est la cause de bien des « erreurs d’optique ») ; il l’est aussi, exactement au même titre, contre toute tradition, qu’elle soit d’Orient ou d’Occident, et sans excepter le Judaïsme.
(René Guénon, Etudes sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, t. I, Compte-rendu juillet 1936).


Un autre point qui est à retenir, c’est que les Supérieurs Inconnus, de quelque ordre qu’ils soient, et quel que soit le domaine dans lequel ils veulent agir, ne cherchent jamais à créer des « mouvements », suivant une expression qui est fort à la mode aujourd’hui ; ils créent seulement des « états d’esprit », ce qui est beaucoup plus efficace, mais peut-être un peu moins à la portée de tout le monde. Il est incontestable, encore que certains se déclarent incapables de le comprendre, que la mentalité des individus et des collectivités peut être modifiée par un ensemble systématisé de suggestions appropriées ; au fond, l’éducation elle-même n’est guère autre chose que cela, et il n’y a là-dedans aucun « occultisme ». Du reste, on ne saurait douter que cette faculté de suggestion puisse être exercée, à tous les degrés et dans tous les domaines, par des hommes « en chair et en os », lorsqu’on voit, par exemple, une foule entière illusionnée par un simple fakir, qui n’est cependant qu’un initié de l’ordre le plus inférieur, et dont les pouvoirs sont assez comparables à ceux que pouvait posséder un Gugomos ou un Schroepfer. Ce pouvoir de suggestion n’est dû, somme toute, qu’au développement de certaines facultés spéciales, quand il s’applique seulement au domaine social et s’exerce sur l’ « opinion », il est surtout affaire de psychologie : un « état d’esprit » déterminé requiert des conditions favorables pour s’établir, et il faut savoir, ou profiter de ces conditions si elles existent déjà, ou en provoquer soi-même la réalisation. Le socialisme répond à certaines conditions actuelles, et c’est là ce qui fait toutes ses chances de succès ; que les conditions viennent à changer pour une raison ou pour une autre, et le socialisme, qui ne pourra jamais être qu’un simple moyen d’action pour des Supérieurs Inconnus, aura vite fait de se transformer en autre chose dont nous ne pouvons même pas prévoir le caractère. C’est peut-être là qu’est le danger le plus grave, surtout si les Supérieurs Inconnus savent, comme il y a tout lieu de l’admettre, modifier cette mentalité collective qu’on appelle l’ « opinion » ; c’est un travail de ce genre qui s’effectua au cours du XVIIIème siècle et qui aboutit à la Révolution, et, quand celle-ci éclata, les Supérieurs Inconnus n’avaient plus besoin d’intervenir, l’action de leurs agents subalternes était pleinement suffisante. Il faut, avant qu’il ne soit trop tard, empêcher que de pareils événements se renouvellent, et c’est pourquoi, dirons-nous avec M. Copin-Albancelli, « il est fort important d’éclairer le peuple sur la question maçonnique et ce qui se cache derrière».
(René Guénon, Réflexions à propos du « Pouvoir Occulte », 11 Juin 1914, La France antimaçonnique)


Bien plus, la « subversion » la plus habile et la plus dangereuse est certainement celle qui ne se trahit pas par des singularités trop manifestes et que n’importe qui peut facilement apercevoir, mais qui déforme le sens des symboles ou renverse leur valeur sans rien changer à leurs apparences extérieures. Mais la ruse la plus diabolique de toutes est peut-être celle qui consiste à faire attribuer au symbolisme orthodoxe lui-même, tel qu’il existe dans les organisations véritablement traditionnelles, et plus particulièrement dans les organisations initiatiques, qui sont surtout visées en pareil cas, l’interprétation à rebours qui est proprement le fait de la « contre-initiation » ; et celle-ci, comme nous l’avons signalé dernièrement, ne se prive pas d’user de ce moyen pour provoquer les confusions et les équivoques dont elle a quelque profit à tirer. C’est là, au fond, tout le secret de certaines campagnes menées, soit contre l’ésotérisme en général, soit contre telle ou telle forme initiatique en particulier, avec l’aide inconsciente de gens dont la plupart seraient fort étonnés, et même épouvantés, s’ils pouvaient se rendre compte de ce pour quoi on les utilise ; il arrive malheureusement parfois que ceux qui croient combattre le diable se trouvent ainsi tout simplement, sans s’en douter le moins du monde, transformés en ses meilleurs serviteurs !
(René Guénon, Du double sens des symboles, Études Traditionnelles, juillet 1937)


« Risque de catastrophe complète par la renonciation à l'esprit
67 - Notre société moderne est donc malade ; et les nouvelles formules d'unité, les nouveaux types d'unité, loin de la guérir, ne peuvent que la rendre encore plus malade. Car ils décomposent, avec la pensée et l'idéal de vie, d'eux-mêmes devenus mécaniquement dissociateurs, la consistance interne de la vie sociale humaine ; et pareillement les facteurs naturels de sa constitution, tout comme son fondement naturel, l'unité de la personnalité humaine. Ils risquent, en dernière analyse, d'acheminer l'humanité vers une catastrophe, par leur conception mécanique atomistique du genre humain, par la renonciation radicale à l'Esprit, au fond à l'Esprit de Dieu. 
Faut-il encore, dans le même sens, au sujet de ces formes d'Unité du Totalitarisme extensif, une dernière preuve. La pensée, avec ses procédés de pure mécanique, était désormais incapable, parce que déspiritualisée, de percevoir les divers facteurs naturels de l'édification de la société et leur interdépendance essentielle, ainsi que l'Unité au sein de la Pluralité ; elle ne pouvait plus pousser de l'aant, jusqu'à la véritable Unité et Totalité d'un système complet du monde, comportant une Totalité intensive, c'est-à-dire une authentique Unité dans une authentique Pluralité. Ce qu'elle conservait, pour ainsi dire, de l'Esprit, c'était uniquement l'intelligence, qui précisément ne méritait plus, nous l'avons vu, ce nom-là, pris dans son sens profond, c'est-à-dire dans le sens de l'Esprit, mais en revanche devait s'attendre d'autant plus à ce que la lutte fut engagée contre elle en ces dernières années. »
(Humani Generis Unitas. Pope Pius XI - Ineditum, 1938, §67 ; in Georges Passelecq, Bernard Suchecky, L'Encyclique cachée de Pie XI, Ed. La Découverte, 1995, Pp. 249-250)


Après les considérations que nous avons exposées et les exemples que nous avons donnés jusqu’ici, on pourra mieux comprendre en quoi consistent exactement, d’une façon générale, les étapes de l’action antitraditionnelle qui a véritablement « fait » le monde moderne comme tel ; mais, avant tout, il faut bien se rendre compte que, toute action effective supposant nécessairement des agents, celle-là ne peut, pas plus qu’une autre, être une sorte de production spontanée et « fortuite », et que, s’exerçant spécialement dans le domaine humain, elle doit forcément impliquer l’intervention d’agents humains. Le fait que cette action concorde avec les caractères propres de la période cyclique où elle s’est produite explique qu’elle ait été possible et qu’elle ait réussi, mais il ne suffit pas à expliquer la façon dont elle a été réalisée et n’indique pas les moyens qui ont été mis en œuvre pour y parvenir. Du reste, il suffit, pour s’en convaincre, de réfléchir quelque peu à ceci : les influences spirituelles elles-mêmes, dans toute organisation traditionnelle, agissent toujours par l’intermédiaire d’êtres humains, qui sont les représentants autorisés de la tradition, bien que celle-ci soit réellement « supra-humaine » dans son essence ; à plus forte raison doit-il en être de même dans un cas où n’entrent en jeu que des influences psychiques, et même de l’ordre le plus inférieur, c’est-à-dire tout le contraire d’un pouvoir transcendant par rapport à notre monde, sans compter que le caractère de « contrefaçon » qui se manifeste partout dans ce domaine, et sur lequel nous aurons encore à revenir, exige encore plus rigoureusement qu’il en soit ainsi. D’autre part, comme l’initiation, sous quelque forme qu’elle se présente, est ce qui incarne véritablement l’« esprit » d’une tradition, et aussi ce qui permet la réalisation effective des états « supra-humains », il est évident que c’est à elle que doit s’opposer le plus directement (dans la mesure toutefois ou une telle opposition est concevable) ce dont il s’agit ici, et qui tend au contraire, par tous les moyens, à entraîner les hommes vers l’« infra-humain » ; aussi le terme de « contre-initiation » est-il celui qui convient le mieux pour désigner ce à quoi se rattachent, dans leur ensemble et à des degrés divers (car, comme dans l’initiation encore, il y a forcément là des degrés), les agents humains par lesquels s’accomplit l’action antitraditionnelle; et ce n’est pas là une simple dénomination conventionnelle employée pour parler plus commodément de ce qui n’a vraiment aucun nom, mais bien une expression qui correspond aussi exactement que possible à des réalités très précises.

Il est assez remarquable que, dans tout l’ensemble de ce qui constitue proprement la civilisation moderne, quel que soit le point de vue sous lequel on l’envisage, on ait toujours à constater que tout apparaît comme de plus en plus artificiel, dénaturé et falsifié ; beaucoup de ceux qui font aujourd’hui la critique de cette civilisation en sont d’ailleurs frappés, même lorsqu’ils ne savent pas aller plus loin et n’ont pas le moindre soupçon de ce qui se cache en réalité derrière tout cela. Il suffirait pourtant, nous semble-t-il, d’un peu de logique pour se dire que, si tout est ainsi devenu artificiel, la mentalité même à laquelle correspond cet état de choses ne doit pas l’être moins que le reste, qu’elle aussi doit être « fabriquée » et non point spontanée ; et, dès qu’on aurait fait cette simple réflexion, on ne pourrait plus manquer de voir les indices concordants en ce sens se multiplier de toutes parts et presque indéfiniment ; mais il faut croire qu’il est malheureusement bien difficile d’échapper aussi complètement aux « suggestions » auxquelles le monde moderne comme tel doit son existence même et sa durée, car ceux mêmes qui se déclarent le plus résolument « antimodernes » ne voient généralement rien de tout cela, et c’est d’ailleurs pourquoi leurs efforts sont si souvent dépensés en pure perte et à peu près dépourvus de toute portée réelle.

L’action antitraditionnelle devait nécessairement viser à la fois à changer la mentalité générale et à détruire toutes les institutions traditionnelles en Occident, puisque c’est là qu’elle s’est exercée tout d’abord et directement, en attendant de pouvoir chercher à s’étendre ensuite au monde entier par le moyen des Occidentaux ainsi préparés à devenir ses instruments. D’ailleurs, la mentalité étant changée, les institutions, qui dès lors ne lui correspondaient plus, devaient par là même être facilement détruites ; c’est donc le travail de déviation de la mentalité qui apparaît ici comme véritablement fondamental, comme ce dont tout le reste dépend en quelque façon, et, par conséquent, c’est là-dessus qu’il convient d’insister plus particulièrement. Ce travail, évidemment, ne pouvait pas être opéré d’un seul coup, quoique ce qu’il y a peut-être de plus étonnant soit la rapidité avec laquelle les Occidentaux ont pu être amenés à oublier tout ce qui, chez eux, avait été lié à l’existence d’une civilisation traditionnelle ; si l’on songe à l’incompréhension totale dont les XVIIe et XVIIIe siècles ont fait preuve à l’égard du moyen âge, et cela sous tous les rapports, il devrait être facile de comprendre qu’un changement aussi complet et aussi brusque n’a pas pu s’accomplir d’une façon naturelle et spontanée. Quoi qu’il en soit, il fallait tout d’abord réduire en quelque sorte l’individu à lui-même, et ce fut là surtout, comme nous l’avons expliqué, l’œuvre du rationalisme, qui dénie à l’être la possession et l’usage de toute faculté d’ordre transcendant ; il va de soi, d’ailleurs, que le rationalisme a commencé à agir avant même de recevoir ce nom avec sa forme plus spécialement philosophique, ainsi que nous l’avons vu à propos du Protestantisme ; et, du reste, l’« humanisme » de la Renaissance n’était lui-même rien d’autre que le précurseur direct du rationalisme proprement dit, puisque qui dit « humanisme » dit prétention de ramener toutes choses à des éléments purement humains, donc (en fait tout au moins, sinon encore en vertu d’une théorie expressément formulée) exclusion de tout ce qui est d’ordre supra-individuel.

Il fallait ensuite tourner entièrement l’attention de l’individu vers les choses extérieures et sensibles, afin de l’enfermer pour ainsi dire, non pas seulement dans le domaine humain, mais, par une limitation beaucoup plus étroite encore, dans le seul monde corporel ; c’est là le point de départ de toute la science moderne, qui, dirigée constamment dans ce sens, devait rendre cette limitation de plus en plus effective. La constitution des théories scientifiques, ou philosophico-scientifiques si l’on veut, dut aussi procéder graduellement ; et (nous n’avons, ici encore, qu’à rappeler sommairement ce que nous avons déjà exposé) le mécanisme prépara directement la voie au matérialisme, qui devait marquer, d’une façon en quelque sorte irrémédiable, la réduction de l’horizon mental au domaine corporel, considéré désormais comme la seule « réalité », et d’ailleurs dépouillé lui-même de tout ce qui ne pouvait pas être regardé comme simplement « matériel » ; naturellement, l’élaboration de la notion même de « matière » par les physiciens devait jouer ici un rôle important. On était dès lors entré proprement dans le « règne de la quantité » ; la science profane, toujours mécaniste depuis Descartes, et devenue plus spécialement matérialiste à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, devait, dans ses théories successives devenir de plus en plus exclusivement quantitative, en même temps que le matérialisme, s’insinuant dans la mentalité générale, arrivait à y déterminer cette attitude, indépendante de toute affirmation théorique, mais d’autant plus diffusée et passée finalement à l’état d’une sorte d’« instinct », que nous avons appelée le « matérialisme pratique », et cette attitude même devait être encore renforcée par les applications industrielles de la science quantitative, qui avaient pour effet d’attacher de plus en plus complètement les hommes aux seules réalisations « matérielles ». L’homme « mécanisait » toutes choses, et finalement il en arrivait à se « mécaniser » lui-même, tombant peu à peu à l’état des fausses « unités » numériques perdues dans l’uniformité et l’indistinction de la « masse », c’est-à-dire en définitive dans la pure multiplicité ; c’est bien là, assurément, le triomphe le plus complet qu’on puisse imaginer de la quantité sur la qualité.

Cependant, en même temps que se poursuivait ce travail de « matérialisation » et de « quantification », qui du reste n’est pas encore achevé et ne peut même jamais l’être, puisque la réduction totale à la quantité pure est irréalisable dans la manifestation, un autre travail, contraire en apparence seulement, avait déjà commencé, et cela, rappelons-le, dès l’apparition même du matérialisme proprement dit. Cette seconde partie de l’action antitraditionnelle devait tendre, non plus à la « solidification », mais à la dissolution ; mais, bien loin de contrarier la première tendance, celle qui se caractérise par la réduction au quantitatif, elle devait l’aider lorsque le maximum de la « solidification » possible aurait été atteint, et que cette tendance, ayant dépassé son premier but en voulant aller jusqu’à ramener le continu au discontinu, serait devenue elle-même une tendance vers la dissolution. Aussi est-ce à ce moment que ce second travail, qui d’abord ne s’était effectué, à titre de préparation, que d’une façon plus ou moins cachée et en tout cas dans des milieux restreints, devait apparaître au jour et prendre à son tour une portée de plus en plus générale, en même temps que la science quantitative elle-même devenait moins strictement matérialiste, au sens propre du mot, et finissait même par cesser de s’appuyer sur la notion de « matière », rendue de plus en plus inconsistante et « fuyante » par la suite même de ses élaborations théoriques. C’est là l’état où nous en sommes présentement : le matérialisme ne fait plus que se survivre à lui-même, et il peut sans doute se survivre plus ou moins longtemps, surtout en tant que « matérialisme pratique » ; mais, en tout cas, il a désormais cessé de jouer le rôle principal dans l’action antitraditionnelle.

Après avoir fermé le monde corporel aussi complètement que possible, il fallait, tout en ne permettant le rétablissement d’aucune communication avec les domaines supérieurs, le rouvrir par le bas, afin d’y faire pénétrer les forces dissolvantes et destructives du domaine subtil inférieur ; c’est donc le « déchaînement » de ces forces, pourrait-on dire, et leur mise en œuvre pour achever la déviation de notre monde et le mener effectivement vers la dissolution finale, qui constituent cette seconde partie ou cette seconde phase dont nous venons de parler. On peut bien dire, en effet, qu’il y a là deux phases distinctes, bien qu’elles aient été en partie simultanées, car, dans le « plan » d’ensemble de la déviation moderne, elles se suivent logiquement et n’ont que successivement leur plein effet ; du reste, dès que le matérialisme était constitué, la première était en quelque sorte virtuellement complète et n’avait plus qu’à se dérouler par le développement de ce qui était impliqué dans le matérialisme même ; et c’est précisément alors que commença la préparation de la seconde, dont on n’a encore vu actuellement que les premiers effets, mais pourtant des effets déjà assez apparents pour permettre de prévoir ce qui s’ensuivra, et pour qu’on puisse dire, sans aucune exagération, que c’est ce second aspect de l’action antitraditionnelle qui, dès maintenant, passe véritablement au premier plan dans les desseins de ce que nous avons d’abord désigné collectivement comme l’« adversaire » et que nous pouvons, avec plus de précision, nommer la « contre-initiation ».
(René Guénon, Le Règne de la quantité et les signes du temps, 1945, chap. XXVIII : Les étapes de l’action antitraditionnelle, Pp.187-191)

Si vous n'aviez pas encore compris...


« On peut imaginer que chaque individu accepte, volontairement ou sans le savoir, une puce en lui, qui contiendrait tout un tas d'information sur lui qui permettrait à la fois de payer tout, de tout savoir... Mais donc d'être libéré d'un certain nombre de contraintes. [...] Le vrai luxe de demain, ce sera d'être isolable, de pouvoir s'isoler, et la vraie liberté, ce ne sera pas d'être relié aux autres, mais d'avoir le droit de ne pas être branché. »
(Jacques Attali, interview à la chaîne Public Sénat, 2008)

« L'homme, comme l'objet, y sera nomade, sans adresse ni famille stable, porteur sur lui, en lui, de tout ce qui fera sa valeur sociale. (...) Devenu prothèse de lui-même, l'homme se produira comme une marchandise. La vie sera l'objet d'artifice, créatrice de valeur et de rentabilité. »
(Jacques Attali, Lignes d'horizon, Fayard, 1990, Pp. 50 et 179)



« On pourrait dire que, parmi les instruments ou les moyens de tout genre mis en œuvre pour ce dont il s’agit, la « pseudo-initiation », par sa nature même, doit logiquement occuper le premier rang ; elle n’est qu’un rouage, bien entendu, mais un rouage qui peut commander à beaucoup d’autres, sur lequel ces autres viennent s’engrener en quelque sorte et dont ils reçoivent leur impulsion. [...] Il résulte immédiatement de là que l’action exercée ainsi, au lieu d’être réellement « organique », ne peut avoir qu’un caractère purement « mécanique », ce qui justifie d’ailleurs pleinement la comparaison des rouages que nous venons d’employer ; et ce caractère n’est-il pas justement aussi, comme nous l’avons déjà vu, celui qui se retrouve partout, et de la façon la plus frappante, dans le monde actuel, où la machine envahit tout de plus en plus, où l’être humain lui-même est réduit, dans toute son activité, à ressembler le plus possible à un automate, parce qu’on lui a enlevé toute spiritualité ? Mais c’est bien là qu’éclate toute l’infériorité des productions artificielles, même si une habileté « satanique » a présidé à leur élaboration ; on peut bien fabriquer des machines, mais non pas des êtres vivants, parce que, encore une fois, c’est l’esprit lui-même qui fait et fera toujours défaut. »
(René Guénon, Le Règne de la quantité et les signes du temps, 1945, Pp.177)

« Quand un peuple perd le contrôle de ses propres affaires, est réduit comme en esclavage et devient un instrument aux mains d'autrui, l'apathie le submerge. Il perd, peu à peu, tout espoir. [...] Les vaincus s'affaiblissent et deviennent incapables de se défendre. Ils sont victimes de quiconque veut les dominer et la proie des gros appétits. [...] Voyez aussi les animaux de proie, qui ne se reproduisent pas en captivité. Ainsi, le groupe tribal qui a perdu le contrôle de ses propres affaires continue de s'affaiblir et finit par disparaître. »
(Ibn Khaldoun, Al-Muqaddima [Introduction à l'histoire universelle], 1377 ; II, 23)


2016/07/24

Faut-il craindre une guerre avec la Russie à l'horizon 2030?

(source de l'image)
L’Express a publié cette semaine un article de Fredrik Wesslau et Andrew Wilson du CFR Européen intitulé ‘Faut-il craindre une guerre avec la Russie à l'horizon 2030?’ que j’estime typique de la doublepensée. [1] 

La doublepensée est en bref caractérisée par une inversion de la logique. La victime est ciblée comme étant l’agresseur, etc. Il est aisé de replacer les choses dans l’ordre correct quand vous connaissez cette recette. C’est ce que j’ai décidé de faire avec l’article de Wesslau et Wilson, à l’identique du procédé que j’avais déjà employé, en veillant pour cette démonstration à rester aussi proche que possible des phrases d’origine, et en ajoutant ou  modifiant certains liens URL.

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L'objectif des Etats-Unis est de conserver son statut de grande puissance. Pour ce faire, ils ne cessent d'user de stratégies économiques, militaires et diplomatiques qui font craindre le pire à ses vassaux et à l'Union européenne. L'analyse de Bruno Paul fondateur de l’initiative Conscience-sociale.org consacrée notamment aux sciences politiques.

D'après l'agence spatiale russe, la Russie colonisera la lune en 2030, les cosmonautes y construiront une base dotée d'une centrale solaire et d'un laboratoire scientifique au-dessus desquels orbitera un satellite. La NASA estime quant à elle à 70% de chances de succès la construction leur nouveau lanceur spatial d’ici 2023, après les abandons des programmes précédents qui menacent singulièrement leur souveraineté dans l’espace. Donald Trump sera peut-être parti depuis longtemps -ou peut-être sera-t-il toujours président. Les Etats-Unis compteront 10% d’habitants en plus qu'aujourd'hui -sauf si Trump bouleverse la politique migratoire- et la croissance restera impossible à prédire. Reste la question de la position du pays sur la scène internationale... 
Dans un article publié par le Magazine d’Anticipation Politique en mars 2013, nous avions expliqué pourquoi les Etats-Unis connaitraient une contre-révolution en 2016. L’actualité nous a hélas donné pleinement raison. Dans le présent article nous examinons comment les Etats-Unis et ses vassaux de l'Est de l'Union européenne pourraient se développer d'ici 2030. 

Pour se légitimer, la Maison Blanche a recourt au conflit

Depuis que G.W. Bush est devenu président en 2000, le contrat social des présidents avec les Américains repose sur la protection contre la menace terroriste au détriment des améliorations régulières de la qualité de vie et des libertés individuelles. Les inégalités de richesse ont explosé aux Etats-Unis, la classe moyenne d'érode rapidement, alors que de 1999 à 2013 le salaire moyen en Russie est passé de 60 à 940 dollars. Mais ce bilan social américain pourrait encore plus se déliter.  
Après l’absence de rebond les deux prochaines années, l'économie européenne stagnera. Les sanctions occidentales, si elles perdurent, influenceront cette impasse économique mais de plus gros problèmes impacteront l'économie américaine, notamment le déclin migratoire, la corruption, la faiblesse de l'État de droit et la mauvaise gestion. D'ici 2030, les Etats-Unis auront perdu plusieurs places et ne devrait plus être dans les 2 premières économies du monde. 
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Pour renforcer sa légitimité, la Maison Blanche se repose sur le nationalisme, l'aventurisme dans ses affaires étrangères et la désignation d'ennemis extérieurs. Il y aura davantage de "petites guerres avec de courtes victoires" -dans les pays dans la sphère d’influence, dans certains pays du Moyen-Orient - comme on l'a vu en Ukraine et au Brésil. Leur but est de susciter de la légitimité, de détourner l'attention de l'économie et de renforcer le discours selon lequel les Etats-Unis sont toujours une grande puissance. 

Une recherche de l'escalade si ce n'est de la guerre

De ses aventures militaires récentes (Syrie, Afghanistan, Libye, Iraq), Washington n’a pas appris que la force militaire n’est un instrument de politique étrangère efficace pour atteindre des objectifs diplomatiques et politiques qu’à court terme. La modernisation des forces armées se heurte aux restrictions des ressources, mais confère encore à la Maison Blanche un instrument puissant. 
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Les forces armées de l’OTAN continueront de cibler principalement l’Organisation de Coopération de Shanghai (OCS) et les pays limitrophes. Les régions les plus exposées sont les États baltes, les Balkans occidentaux, l’Amérique du Sud, l’Afrique du Sud et l'Asie centrale. L'OTAN ne cherchera pas de manière proactive à entrer en guerre avec l'OCS, mais voit un intérêt à s'engager avec empressement dans une escalade majeure, jusqu'à manifester sa volonté -réelle ou feinte- d'utiliser des armes nucléaires

Ses vassaux de l'Est et de l'Europe Centrale en première ligne

Les Etats-Unis devraient encore tenter de dominer ses vassaux les plus sous influence, notamment l'Ukraine. Des vassaux obéissants sont indispensables à la sécurité de l’Etat profond américain et à ses ambitions de grande puissance. Son but maximaliste est un cercle d'États vassaux s'alignant sur les positions de Washington. Le but minimaliste est un cercle d'États faibles et dysfonctionnels, gérés par des leaders corrompus, incapables de se réformer ou de rejoindre l'OCS, l’Union Economique Eurasienne ou l'ASEAN, donc de facto inféodés à Washington. 
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La Géorgie, l'Ukraine et la Moldavie devraient patauger entre semi-démocratie et réformes partielles. Le postcommunisme miné par l’Etat profond transnational est bien plus difficile à réformer que le communisme, dans la mesure où les élites locales et les réseaux de corruption ont acquis les moyens de reproduire leur pouvoir. Des oligarques et des hommes politiques contrôlent les organes de presse et manipulent la politique. Des systèmes judiciaires pervertis protègent l'élite et minent l'État de droit. 
La Biélorussie, l'Azerbaïdjan et l'Arménie éviteront le déclin en dialoguant avec l'UE en tant que membre de l’OCS. La Biélorussie et l'Arménie resteront dans l’alliance OCS, mais l'amenuisement des ressources de l’OTAN provoqueront une recrudescence de tensions et de menaces de la part de Varsovie et même de Kiev soucieux de s'aligner au contraire avec l'OTAN. Les nationalismes biélorusse et arménien, plus nativistes, devraient croître sous l’influence de la guerre réseaucentrique menée par l’Occident. 

L'Europe dispose de très peu d'options politiques

L'influence que l'Europe peut avoir sur le comportement russe et américain a ses limites. Notamment compte tenu du fait que l'assurance des Etats-Unis est de plus en plus animée par le désir de la Maison Blanche de se légitimer face au déclin économique. 
Cela laisse très peu de bonnes options politiques à l'Europe. Les sanctions économiques sont brutales, ont un coût pour l'Europe et alimentent le story telling de la Maison Blanche. Encourager la dissidence vis-à-vis de l’OTAN des pays-refuzniks de l'Est pose un dilemme sécuritaire classique et fait également le jeu de l’Etat profond américain. Mais en dépit de leurs inconvénients, ces mesures d’émancipation sont nécessaires face à l'agressivité de l’Etat profond américain pour protéger les nouveaux principes sous-jacents à l'ordre sécuritaire de l'Europe. 
Le dialogue est vital, mais doit être approprié. Il ne doit pas signifier une acceptation implicite des transgressions des Etats-Unis en Ukraine ou être synonyme de "business as usual". Si la tendance est aux conflits, alors l'ouverture des canaux de communication avec Moscou et avec Washington sera indispensable pour éviter des calculs fatals.

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[1] Georges Orwell l’a défini ainsi dans son œuvre célèbre ‘1984’ : 
Connaître et ne pas connaître. En pleine conscience et avec une absolue bonne foi, émettre des mensonges soigneusement agencés. Retenir simultanément deux opinions qui s’annulent alors qu’on les sait contradictoires et croire à toutes deux. Employer la logique contre la logique. Répudier la morale alors qu’on se réclame d’elle. Croire en même temps que la démocratie est impossible et que le Parti est gardien de la démocratie. Oublier tout ce qu’il est nécessaire d’oublier, puis le rappeler à sa mémoire quand on en a besoin, pour l’oublier plus rapidement encore. Surtout, appliquer le même processus au processus lui-même. Là était l’ultime subtilité. Persuader consciemment l’inconscient, puis devenir ensuite inconscient de l’acte d’hypnose que l’on vient de perpétrer. La compréhension même du mot « double pensée » impliquait l’emploi de la double pensée. (chapitre III)
La doublepensée est le pouvoir de garder à l’esprit simultanément deux croyances contradictoires, et de les accepter toutes deux. Un intellectuel du Parti sait dans quel sens ses souvenirs doivent être modifiés. Il sait, par conséquent, qu’il joue avec la réalité, mais, par l’exercice de la doublepensée, il se persuade que la réalité n’est pas violée. Le processus doit être conscient, autrement il ne pourrait être réalisé avec une précision suffisante, mais il doit aussi être inconscient.
Sinon, il apporterait avec lui une impression de falsification et, partant, de culpabilité.
La doublepensée se place au cœur même du socialisme Anglo-saxon, puisque l’acte essentiel du Parti est d’employer la duperie consciente, tout en retenant la fermeté d’intention qui va de pair avec l’honnêteté véritable. Dire des mensonges délibérés tout en y croyant sincèrement, oublier tous les faits devenus gênants puis, lorsque c’est nécessaire, les tirer de l’oubli pour seulement le laps de temps utile, nier l’existence d’une réalité objective alors qu’on tient compte de la réalité qu’on nie, tout cela est d’une indispensable nécessité.
Pour se servir même du mot doublepensée, il est nécessaire d’user de la dualité de la pensée, car employer le mot, c’est admettre que l’on modifie la réalité. Par un nouvel acte de doublepensée, on efface cette connaissance, et ainsi de suite indéfiniment, avec le mensonge toujours en avance d’un bond sur la vérité.
Enfin, c’est par le moyen de la doublepensée que le Parti a pu […] arrêter le cours de l’Histoire.
Toutes les oligarchies du passé ont perdu le pouvoir, soit parce qu’elles se sont ossifiées, soit parce que leur énergie a diminué. Ou bien elles deviennent stupides et arrogantes, n’arrivent pas à s’adapter aux circonstances nouvelles et sont renversées ; ou elles deviennent libérales et lâches, font des concessions alors qu’elles devraient employer la force, et sont encore renversées. Elles tombent, donc, ou parce qu’elles sont conscientes, ou parce qu’elles sont inconscientes.
L’œuvre du Parti est d’avoir produit un système mental dans lequel les deux états peuvent coexister. La domination du Parti n’aurait pu être rendue permanente sur aucune autre base intellectuelle. Pour diriger et continuer à diriger, il faut être capable de modifier le sens de la réalité. Le secret de la domination est d’allier la foi en sa propre infaillibilité à l’aptitude à recevoir les leçons du passé.
Il est à peine besoin de dire que les plus subtils praticiens de la doublepensée sont ceux qui l’inventèrent et qui savent qu’elle est un vaste système de duperie mentale. Dans notre société, ceux qui ont la connaissance la plus complète de ce qui se passe, sont aussi ceux qui sont les plus éloignés de voir le monde tel qu’il est. En général, plus vaste est l’information, plus profonde est l’illusion. Le plus informé est le moins normal.
Le fait que l’hystérie de guerre croît en intensité au fur et à mesure que l’on monte l’échelle sociale illustre ce qui précède. Ceux dont l’attitude en face de la guerre est la plus proche d’une attitude rationnelle sont les peuples sujets des territoires disputés. Pour ces peuples, la guerre est simplement une continuelle calamité qui, comme une vague de fond, va et vient en les balayant. Il leur est complètement indifférent de savoir de quel côté est le gagnant. Un changement de direction veut simplement dire pour eux le même travail qu’auparavant, pour de nouveaux maîtres qui les traiteront exactement comme les anciens.
Les travailleurs légèrement plus favorisés que nous appelons les prolétaires ne sont que par intermittences conscients de la guerre. On peut, quand c’est nécessaire, exciter en eux une frénésie de crainte et de haine, mais laissés à eux-mêmes, ils sont capables d’oublier pendant de longues périodes que le pays est en guerre.
C’est dans les rangs du Parti, surtout du Parti intérieur, que l’on trouve le véritable enthousiasme guerrier. Ce sont ceux qui la savent impossible qui croient le plus fermement à la conquête du monde. Cet enchaînement spécial des contraires (savoir et ignorance, cynisme et fanatisme) est un des principaux traits qui distinguent la société océanienne. L’idéologie officielle abonde en contradictions, même quand elles n’ont aucune raison pratique d’exister.

[…] Ce n’est en effet qu’en conciliant des contraires que le pouvoir peut être indéfiniment retenu. L’ancien cycle ne pouvait être brisé d’aucune autre façon. Pour que l’égalité humaine soit à jamais écartée, pour que les grands, comme nous les avons appelés, gardent perpétuellement leurs places, la condition mentale dominante doit être la folie dirigée. (chapitre IX)


2016/04/04

La Guerre Réseaucentrique révèle l’ère du totalitarisme ultime et planétaire

[Cet article a d'abord été publié par le Centre de Recherche sur la Mondialisation le 3/04/2016]
Cet article est une introduction au paradigme de la « guerre réseaucentrique » (Net-centric warfare), dont les concepts ont été formalisés et élargis depuis les années 1990 par le ministère de la défense américain, en s’inspirant d’autres sources. A la différence de ce qu’indique le contenu actuel de sa page Wikipedia, ce terme est bien loin de seulement refléter « l’utilisation d’Internet sur les champs de bataille ». Le DoD a utilisé à son propos le terme de « Révolution en matière d’affaires militaires ».[1a] 
Les travaux entamés à la fin du XXème siècle ont connus leur mise en pratique très concrète à partir de 2003. En effet, il s’agit d’une théorisation qui englobe les opérations comme les Révolutions de couleur, ainsi que tous les moyens d’influence dont l’objectif explicite est la conquête géopolitique et la domination séculaire. En cela, l’utilisation des opérations définies par cette théorie s’oppose à l’intuition de « volonté prévalente des peuples », proposée par le Pr. P.D. Scott.[1b] Il est alors symptomatique de noter le rapprochement de la guerre réseaucentrique avec la lutte qu’entretiennent les entités politiques de l’État profond vis-à-vis de l’État visible.[2a] Selon nous, la théorie de la guerre réseaucentrique trouve un champ d’application dans la description de la structure et des opérations de l’État profond, en plus de celles du Pentagone. C’est pourquoi la compréhension de la guerre réseaucentrique est d’une immense importance pour l’organisation défensive de la société civile et d’un État visible qui souhaite rester souverain. En effet, nous devons comprendre que si certaines de ces opérations profondes ont été conduites depuis des siècles contre l’État visible, la formalisation de ces concepts et leur intégration méthodique depuis la fin des années 90 n’a pour objectif explicite que de passer à une toute autre échelle et de systématiser ces approches.[2b] Ainsi, c’est la paix qui disparaît complètement, puisque le modus operandi de la guerre réseaucentrique est de ne plus différencier la conduite de la guerre et celle de la paix, les forces amies, alliées, ou neutres des ennemis. La guerre, c’est la paix, désormais plus personne ne peut l’ignorer à l'ère de la démocratie téléguidée et de l'hypercontrôle des sociétés humaines.
Nous avons choisi comme approche pour cette introduction à la guerre réseaucentrique de traduire un article original du Pr. Dr. Vladimir Prav publié en anglais par SouthFront.org le 25/02/2016, ainsi que par le Centre de Recherche sur la Mondialisation le lendemain.[3] Nous l’avons commenté au moyen de l’ajout de toutes les notes de bas de page, prolongé par les URL, ainsi que par l’addition d'une compilation bibliographique des ouvrages de recherche militaire sur la guerre réseaucentrique et ses prolongements.[5a, 5b, 5c]
Dr. Bruno Paul


”Révolutions de couleur” et ”Guerres réseaucentriques” : luttes géopolitiques et fonctionnement des « réseaux »

Les concepts contemporains de la lutte géopolitique comprennent invariablement des mentions concernant la création et le fonctionnement de « réseaux ». La notion de « réseau » ou d’un « principe du réseau » réside dans l’échange d’informations, dans l’expansion maximale possible de la production de l’information, de son accès, de sa distribution et de l’information en retour. Le « réseau » est l’élément principal de l’espace d’information, dans lequel les opérations d’information sont menées dans le but de réaliser des objectifs politiques, économiques, informationnels, techniques, et militaires. Le « réseau » en tant que système, dans la compréhension globale du terme, comprend plusieurs éléments qui auparavant étaient habituellement considérés comme des phénomènes strictement séparés.
Le principe fondamental de la conduite de la lutte géopolitique moderne est celui d’une conception fondée sur le réseau ou « réseaucentrisme ». Ce principe repose sur trois postulats.
1. Le monde moderne est défini non seulement par des couloirs de transport avec des flux associés de biens et services, mais aussi par des réseaux d’information et de communications, qui forment le squelette de l’espace d’information mondial.
2. Le processus historique mondial est un processus mondial unifié de conflit, d’entraide mutuelle, ou de coexistence neutre des sociétés humaines organisées suivant des principes hiérarchiques (verticalité) et aussi en réseau (horizontalité), dans lequel le principe en réseau (horizontal) pouvant devenir dominant dans l’avenir. Les structures verticales et de réseaux horizontaux, avec diverses origines, but, force numérique, frontières géographiques et temporelles, et statut juridique, sont à la fois les objets et les sujets du processus historique mondial dont l’interaction facilite l’émergence de structures et connexions nouvelles.
3. Le développement dynamique des réseaux artificiels (électroniques) qui entrelacent et interagissent avec les réseaux psycho-sociaux et qui constituent un phénomène social qualitativement nouveau, sont une caractéristique unique du squelette du réseau d’information de la future société mondiale. Ce phénomène est identifié au sein du concept de guerre de l’information réseaucentrique comme étant le SPIN -Réseau segmenté, polycentrique, idéologiquement intégré.[4] Il faut noter que Microsoft a proposé une définition plus précise de ce phénomène, à savoir le « système nerveux numérique ».
Le principal acteur mondial utilisant systématiquement le principe du réseaucentrisme dans la lutte géopolitique est les États-Unis. Ses agents exécutifs sont les organismes d’État, les grandes entreprises et les structures internationales en réseau qui sont tous mutuellement entrelacés.
Les structures internationales en réseau, qui sont généralement appelés « les acteurs en coulisses », et qui sont les initiateurs fondamentaux du processus de la mondialisation, sont essentiellement un réseau d’ONG très influentes qui forment la « super-communauté » idéologique des mondialistes Euro-Atlantiques (ou occidentaux) et qui sont fermées aux nouveaux entrants. Une telle structure en réseau peut exercer une pression sérieuse sur l’ensemble de l’environnement politique mondial, le système financier, l’économie, à travers ses représentants et entités internationales de rang inférieur. Ils peuvent aussi décider et mettre en œuvre des décisions pour effectuer un changement de régime et de l’évolution du développement de pays sélectionnés.
En se fondant sur la mobilisation des actifs réseaucentriques situés sous le contrôle de ces représentants, la « super-communauté » des mondialistes Euro-Atlantiques peuvent mettre en œuvre une résolution «douce» d’un large éventail de problèmes politiques nationaux et internationaux clairement définis et coordonnés. La direction et le contrôle global peuvent être effectués grâce à l’existence d’une telle organisation méta-réseaucentrique, distribuée et hiérarchisée, dont les échelons supérieurs sont représentés par des réseaux qui appartiennent à la « super-communauté » occidentale. L’individu étant dirigé peut même ne pas comprendre qu’il est dirigé, et même s’il le comprend, il ne sera pas en mesure de comprendre d’où les instructions émanent et qui en porte la responsabilité.
Le contenu principal de toutes les guerres réseaucentriques se compose d’« opérations basées sur les effets » (Effects-based operations ou EBO). Ceci est le concept le plus important dans toute la théorie de la guerre réseaucentrique développée aux États-Unis.[5a, 5b] Les EBO sont définis par les spécialistes américains comme une « combinaison d’actions visant à la formation d’un modèle spécifique de comportement entre amis, forces neutres, et ennemis en temps de paix, de crise et de guerre ».[6, 7] Le principal résultat des EBO est l’établissement d’un contrôle total et absolu sur toutes les parties prenantes au conflit (y compris lors des conflits armés), et leur manipulation complète en toutes circonstances. Y compris lorsque le conflit est en cours, quand il menace, et quand il y a la paix.[8]
L’essence de la « guerre réseaucentrique » est qu’elle ne dispose pas d’un début ou d’une fin, elle est conduite sur une base permanente, et son objectif est de veiller à ce que les parties prenantes menant la guerre ont la capacité d’effectuer un contrôle complet sur tous les acteurs internationaux. Intégrer le « réseau » prive les pays, les nations, les armées et les gouvernements de tous les vestiges de l’indépendance, de la souveraineté, et même une existence séparée, en les transformant en objets programmés étroitement contrôlés. Il permet la mise en œuvre d’un nouveau modèle de contrôle planétaire direct, d’une domination mondiale d’un nouveau type, où le contenu, la motivation, les actions et les intentions des acteurs internationaux sont tous soumis à une direction extérieure.
Il s’agit d’une conception d’une manipulation globale et d’un contrôle total à l’échelle mondiale. Cela ressort de la définition de l’EBO. Les tâches de l’EBO comprennent la formation d’une structure de comportement non seulement entre amis, mais aussi avec les parties prenantes neutres et ennemies, en d’autres termes, à la fois les ennemis et les parties neutres agissent en conformité avec un scénario qui leur sont imposées et sont conduits non pas par leur propre volonté, mais par la volonté des exécuteurs de l’EBO. Si les ennemis, les amis et les parties neutres font ce que les Américains veulent qu’ils fassent, ils deviennent des marionnettes avant même leur ultime défaite.[9] La bataille est gagnée avant même qu’elle ne commence.[10] Les EBO sont menées simultanément avec les opérations militaires, en période de crise et en temps de paix, ce qui reflète le caractère total des guerres réseaucentriques.
L’objectif stratégique d’une guerre réseaucentrique est le contrôle absolu sur tous les participants au processus politique à l’échelle mondiale. Son objectif tactique est d’établir le contrôle par l’agresseur géopolitique sur les actifs de l’État victime, avec un « transfert » se déroulant en grande partie d’une manière volontaire et consentant puisque l’attaque n’est pas perçue comme une agression, mais plutôt comme un élan vers un développement ultérieur.
Ceci rend la guerre réseaucentrique beaucoup plus complexe à mettre en œuvre qu’une guerre traditionnelle “chaude”, mais elle est aussi beaucoup plus efficace. Les résultats des « guerres chaudes » sont généralement contestés et se dissipent au fil du temps (comme l’ont montré la première guerre mondiale et, en particulier, la deuxième). Les effets des guerres réseaucentriques peuvent durer pendant des siècles, jusqu’à ce que les agresseurs et leurs besoins fondamentaux changent.
Le front principal de la guerre réseaucentrique est situé dans l’espace mental, avec l’objectif de l’ennemi étant de détruire les valeurs fondamentales traditionnelles d’une nation donnée et d’implanter les siennes. L’existence et la structure de ce type de guerre ne peuvent pas être perçues au niveau de la conscience des masses. Si l’élite politique d’une société qui est visée par une guerre réseaucentrique n’est pas suffisamment qualifiée pour identifier ce type d’agression et organiser une réponse appropriée, la société elle-même est vouée à une défaite géopolitique écrasante.
Les spécialistes notent une autre caractéristique propre aux guerres réseaucentriques, à savoir l’absence d’une structure rigide au sein de l’entité qui agresse. Nous aimerions souligner que cela est dû au degré élevé d’hétérogénéité entre les éléments institutionnels de cette entité. Les éléments individuels et les éléments étatiques et non-étatiques de l’agresseur relativement autonomes ne font pas partie d’une certaine hiérarchie verticale. Au lieu de cela ils sont reliés par des interactions horizontales irrégulières. L’absence de hiérarchie et de régularité de l’interaction font qu’il est difficile d’identifier clairement l’existence et les activités de l’agresseur.[11]
En raison de la nature particulière de la guerre réseaucentrique, sa structure technologique (ou la somme totale des technologies sociales utilisées pour attaquer la société ciblée) est très complexe. Les technologies pour la guerre réseaucentrique comprennent des combinaisons d’étapes multiples et des intrigues dont les instigateurs ne sont pas évidents, un large éventail de moyens d’influence, et l’utilisation d’individus qui sont ignorants de leur rôle. Plus important encore, selon les experts américains, la guerre réseaucentrique à l’ère informationnelle post-moderne et post-industrielle diffère des guerres ordinaires de l’ère industrielle moderne par leur désir de parvenir à une répartition des territoires et des ressources vers l’extérieur du pays sans effusion de sang. L’objectif est de maintenir l’image des « démocraties développées » qui mènent les guerres réseaucentriques dans une grande variété de contextes géopolitiques sous le slogan de la protection des droits de l’homme. Dans une ère d’« humanisation » totale [12], conduire des opérations de combat est considéré comme une option déficiente. La société mondiale dort mieux si vu de l’extérieur tout semble aller bien. Grâce aux technologies modernes et à l’expérience acquise, même un génocide peut être entrepris sans chambres à gaz ni fusillades de masse. Il suffit de créer des conditions pour réduire le taux de natalité et augmenter le taux de mortalité.[13] Le succès peut également être obtenu par le nivellement par le bas de la nation au moyen du changement de ses stéréotypes et de ses normes de comportement de sorte que même une escalade des événements jusqu’au niveau de la violence est perçue comme naturelle.
Aujourd’hui, l’une des manifestations caractéristiques de la guerre réseaucentrique dans un monde globalisé sont les « révolutions de couleur ». Une révolution de couleur est une opération réseaucentrique dont l’objectif est la suppression des régimes politiques existants dans un autre pays.[14] Elle est fondée sur les méthodes de « lutte non-violente » développées par Sharp dans les années 1970.[15] Le concept de la révolution de couleur implique l’établissement d’un contrôle complet sur un pays et son territoire sans l’utilisation de la force armée, si possible. Elle peut être obtenue en appliquant la puissance d’influence (« soft power »), que le politologue américain Joseph Nye Jr. définit comme la capacité d’un État (ou d’une coalition ou d’une alliance) à atteindre des résultats souhaités à l’international par la persuasion et non par la suppression, l’imposition, ou la diplomatie coercitive, qui sont caractéristiques de la puissance coercitive (« hard power »). La puissance d’influence atteint son effet en induisant les autres à adhérer à certaines normes internationales de comportement, ce qui conduit au résultat souhaité sans appliquer de diplomatie coercitive.

Conséquences des Révolutions de couleur.

Pour les États et les systèmes politiques, les révolutions de couleur présentent des aspects du colonialisme. Les intérêts de la société ciblée ne sont pas pris en considération, ils sont remplaçables, interchangeables. Les « révolutionnaires » sont les premiers à disparaître de la scène et, souvent, de la vie elle-même. Les gens qui commencent sincèrement à croire en les idéaux de la révolution de couleur sans se douter que ces idéaux ont été induits pour être le carburant pour de telles révolutions, sont aussi remplaçables. La société elle-même est déstabilisée, les fondements sociaux sont compromis, le respect pour le gouvernement disparaît, l’insatisfaction augmente, et l’économie est tout sauf dans un état normal. Ce sont les conditions idéales pour imposer des modèles sociaux occidentaux. Les États-Unis entrent dans le pays.
Les révolutions de couleur n’apportent aucun avantage aux forces politiques ou à la société du pays. Le seul bénéficiaire est les États-Unis, qui établit un contrôle indolore, non-violent, “soft” sur son nouveau territoire.[9]
La Géorgie moderne est un exemple. Elle a perdu sa souveraineté après que la « révolution des roses » a déclenché des transformations graves, déstabilisant la société, et conduisant à la perte d’environ 20% du territoire du pays. La Géorgie est la plus importante tête de pont des États-Unis dans le Caucase. Il en est ainsi pour plusieurs raisons:
  • La Géorgie est un élément de l’isthme du Caucase par lequel la Russie obtient un contact direct avec l’Iran avec lequel il veut établir une relation stratégique ;
  • La Géorgie est une base pour la constitution et la projection d’une force dans toute la région de la Caspienne, y compris la Fédération de Russie ;
  • La Géorgie est un pays de transit pour les ressources énergétiques de la Caspienne vers l’Europe.
Poursuivant la tâche principale de la géopolitique des États-Unis relative à la Russie et la mer Caspienne, les États-Unis ont fait disparaître en Géorgie les derniers restes de l’influence géopolitique de la Russie [NDT : en 2003] et l’ont soumise à son propre contrôle géopolitique direct. La Géorgie a adopté un vecteur de développement Atlantiste et a perdu les derniers lambeaux de sa souveraineté.

Il existe un certain nombre d’autres facteurs importants.

1. Les États-Unis cherchent à établir un contrôle direct militaire et stratégique sur l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Les dirigeants de l’Azerbaïdjan sont certains que les manifestations de l’opposition en mars 2011 et les tentatives prévues de s’opposer à l’ordre constitutionnel existant ont été organisées à partir de l’extérieur du pays. 
2. Afin d’assurer un partenariat avec l’UE, et en particulier avec l’Allemagne, les États-Unis ont créé un cordon sanitaire s’étendant des mers froides du nord à travers les pays baltes, l’Ukraine, la Moldavie, vers la Géorgie. La Biélorussie est à l’heure actuelle une brèche dans le cordon, avec la Pologne comblant cette brèche. Le cordon – composée de l’Ukraine, de la Lettonie, la Lituanie, l’Estonie, la Moldavie et la Géorgie – qui coupe la Russie de l’Europe, a été créé par les États-Unis afin d’atteindre leurs objectifs géopolitiques de plus grande priorité au moyen du déclenchement séquentiel de révolutions de couleur dans ces pays, dans le cadre de la guerre réseaucentrique contre la Russie.
Au cours des 20 dernières années, les États-Unis et l’OTAN ont transformé l’Ukraine en un pays hostile à la Russie également au moyen de l’application de technologies réseaucentriques. Le coup d’état de 2014 et la guerre civile de 2014-2015 ont été initiés par les États-Unis, qui a également fourni un soutien informationnel, financier et militaire.[9] Les politiques intérieure et extérieure de l’Ukraine présentent un caractère strictement anti-Russe. 
3. L’Ouzbékistan et la Kirghizie resteront des plates-formes clés pour la présence géopolitique des États-Unis en Asie centrale. Les États-Unis ne renonceront jamais à leur intention d’établir un contrôle total sur la région. Ils déstabiliseront régulièrement la situation régionale pour prendre l’Ouzbékistan et la Kirghizie sous contrôle.
Habituellement, de tels échecs lors des tentatives de ce genre de coup d’état sur du velours que nous avons observé dans la ville ouzbek d’Andijan ou dans la quelque peu confuse cascade de révolutions en Kirghizie [16] sont suivis par des scénarios plus sévères. Le niveau de pression est augmenté progressivement. Le scénario «sur du velours» est remplacé par une ligne plus dure, y compris des affrontements avec la police, les premières victimes, des pogroms, puis, en règle générale, la situation est déstabilisée le long des lignes ethniques puisqu’il s’agit du type de conflit le plus dur à résoudre.[17] Ces actions sont accompagnées par une création en parallèle de plusieurs épicentres d’instabilité sociale, l’augmentation des problèmes économiques, les perturbations de la situation sociale, et une polarisation générale de la politique intérieure. Le but est de forcer les dirigeants de ces pays à reconnaitre qu’ils ont perdu le contrôle, qu’ils n’ont plus le pouvoir.
Le résultat est que le territoire du pays passe sous contrôle américain. La révolution de couleur, devrait-elle être un succès ou un demi-succès, est suivie par des approches plus directes qui peuvent finalement conduire à des opérations militaires comme en Irak et en Libye.
Etant un état possédant des armes nucléaires, la Russie est considérée par les États-Unis et l’OTAN comme l’un de ses principaux adversaires géopolitiques. L’objectif géopolitique clé actuel des États-Unis est un changement de régime en Russie consistant à remplacer Vladimir Poutine et son équipe au pouvoir. L’analyse suggère que pour le moment l’Ukraine, le Caucase et l’Asie centrale sont les endroits les plus favorables à utiliser pour les États-Unis afin d’augmenter la pression sur le leadership russe. Le maintien du potentiel de violence dans ces zones se poursuivra jusqu’à ce qu’ils trouvent une nouvelle source plus fraîche de conflit sur le territoire russe, avec un potentiel de succès pour le séparatisme, qui pourrait devenir une source constante de pression politique extérieurement induite sur le leadership russe.[18]
Vladimir Prav
La source originale de cet article est southfront.org :
“Color Revolutions” and “Net-Centric Warfare”: Geopolitical Struggles and the “Functioning of Networks”, 25 février 2016.
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[1a] “Whereas the MTR [military technical revolution] applies new technology to existing ways of war, the RMA [revolution in military affairs] combines new technology with new tactics, doctrine, and/or organization, e.g. the blitzkrieg, or combines new or existing technologies in a new concept of warfare, e.g. the levée en masse and the Napoleonic revolution.” in Effects Based Operations – Applying Network centric Warfare in Peace, Crisis and War, Edward Allen Smith Jr., Washington, DC: DoD CCRP, novembre 2002, chapitre 2.
[1b] MaximeChaix.info, 17/03/2016
[2a] Conscience-Sociale.org, 15/03/2014
[2b] “But is it not the infostructure that is now the long pole in the tent; it is a lack of understanding about effects-based approaches and a lack of a coevolved organizational processes, trained individuals, and appropriate tools. This book will make effects-based approaches more understandable to many and thus will hasten the day when we will be better able to conduct effects-based operations, a capability much needed in our century.” in Future of C2 – COMPLEXITY, NETWORKING, & EFFECTS-BASED APPROACHES TO OPERATIONS, op.cit., Pp vii.
[3] Cet article mériterait d’être traduit dans toutes les langues. Il est déjà disponible en portugais.
[4] En 2006, M. Bishara définissait le SPIN comme une « structure floue et horizontale, à l’instar des groupes écologistes ou féministes, mais aussi des organisations clandestines comme les mafias, les cartels de la drogue et autres réseaux de trafics illégaux » (Le Monde Diplomatique, 10/2006). Soulignons au passage que l’opinion selon laquelle « Washington se révèle [en 2006] incapable de penser les nouveaux types de conflits » est complètement battue en brèche avec la guerre réseaucentrique.
[5a] Bibliographie à propos de la guerre réseaucentrique en se limitant aux publications du ministère de la Défense américain, du Canada et de l'OTAN (l'appellation officielle de l'OTAN pour les "capacités réseaucentriques" est Network-Enabled Capability – NEC), ce qui permet de comprendre à quand remontent ces recherches :
“What Is Information Warfare?” (Libicki, 1995)
“Operations Other Than War” (Alberts, Hayes, 1995)
“The Unintended Consequences of the Information Age” (Alberts, 1996)
“Defensive Information Warfare” (Alberts, 1996)
“Target Bosnia: Integrating Information Activities in Peace Operations” (Siegel, 1998). This book examines the place of PI and PSYOP in peace operations through the prism of NATO operations in Bosnia-Herzegovina.
“Information Warfare and International Law” (Greenberg, Goodman, Soo Hoo, 1998)

Vice Admiral Arthur Cebrowski, John Garstka, "Network-Centric Warfare: Its Origin and Future",   U.S. Naval Institute Proceedings, vol. 124, no 1, janvier 1998, p. 28-35  
“Network Centric Warfare – Developing and Leveraging Information Superiority” (Alberts, Garstka, Stein, 1999)
“Behind the Wizard’s Curtain” (Krygiel, 1999). There is still much to do and more to learn and understand about developing and fielding an effective and durable infostructure as a foundation for the 21st century. Without successfully fielding systems of systems, we will not be able to implement emerging concepts in adaptive and agile C2, nor reap the benefits of NCW.
“Confrontation Analysis: How to Win Operations Other Than War” (Howard, 1999). A peace operations campaign should be seen as a linked sequence of confrontations. The objective in each confrontation is to bring about certain “compliant” behavior on the part of other parties, until the campaign objective is reached.
“Information Campaigns for Peace Operations” (Avruch, Narel, Siegel, 2000). In its broadest sense, this report asks whether the notion of struggles for control over information identifiable in situations of conflict also has relevance for situations of third-party conflict management for peace operations.
“Network Centric Warfare: What’s the Point?”, Naval War College Review, Dr. Edward Allen Smith, Winter 2000-2001
“Understanding Information Age Warfare” (Alberts, Garstka, Hayes, Signori, 2001)
“Information Age Transformation of the DoD” (Alberts, 2002)
“Power to the Edge: Command…Control… in the Information Age” (Alberts, Hayes, 2003). This book articulates the principles being used to provide the ubiquitous network that people will trust and use, populate with information, and use to develop shared awareness, collaborate, and synchronize actions.
“Complexity Theory and Network Centric Warfare” (Moffat, 2003)

"Transformer la guerre de demain : Capacités Réseaucentriques et Systèmes sans pilote" (Pierre Claude Nolin,  2007)
[5b] Bibliographie à propos des opérations basées sur les effets (EBO) et les révolutions de couleur :
Signalons également la théorie de la Guerre Hybride notamment dans l'ouvrage de Andrew Korybko : HYBRID WARS: THE INDIRECT ADAPTIVE APPROACH TO REGIME CHANGE (2015) - lire en particulier une synthèse en français sur Le modèle de la révolution de couleur: le cœur du mécanisme (2014), qui reconstruit un certain nombre d'éléments présents dans la théorie NCW / EBO mais sa propre bibliographie ne mentionne pas les ouvrages fondateurs du DoD sur ce sujet, à part l'édition de Cebrowski et Garstka, op.cit.
Sa bibliographie qui couvre de nombreuses sources comprend néanmoins des références intéressantes pour notre article comme : 

[5c] Pour une synthèse historique du thème de la guerre hybride depuis la renaissance, on consultera :
Citons également ces extraits particulièrement parlants :
  • "Depuis la fin de la dernière guerre mondiale, une forme nouvelle de guerre est née. Appelée parfois guerre subversive ou guerre révolutionnaire, elle diffère essentiellement des guerres du passé en ce sens que la victoire n'est pas attendue uniquement du choc de deux armées sur un champ de bataille. Ce choc, qui visait autrefois à anéantir une armée ennemie en une ou plusieurs batailles, ne se produit plus. La guerre est maintenant un ensemble d'actions de toutes natures (politiques, sociales, économiques, psychologiques, armées, etc.) qui vise le renversement du pouvoir établi dans un pays et son remplacement par un autre régime. Pour y parvenir, l'assaillant s'efforce d'exploiter les tensions internes du pays attaqué, les oppositions politiques, idéologiques, sociales, religieuses, économiques, susceptibles d'avoir une influence profonde sur les populations à conquérir." (Roger Trinquier, La guerre moderne, La table ronde, 1961, Pp.15)
  • "Aujourd'hui, on ne conquiert plus le terrain pour avoir les hommes, on conquiert les âmes, on conquiert le psychisme. Une fois qu'on a le psychisme, on a l'homme. Quand on a l'homme, le terrain suit. La plus grande astuce du diable, c'est de faire croire qu'il n'existe pas. Le moment est venu d'utiliser le mot "subversion". Arme redoutable car elle essaie de ne pas se montrer. [...] Cette méthode redoutable s'inscrit dans l'infiltration d'une partie des médias, d'une partie de ceux qui enseignent aux âmes, aux cœurs et aux cervelles, je veux dire le clergé, l'école, l'Université. Jadis, pour tenir le pouvoir il fallait contrôler l'Eglise, donc les âmes ; au XIXe siècle, c'est l'instruction, donc les cerveaux. Aujourd'hui c'est l'audiovisuel qui prime, et l'Université. En Occident, on n'apprend plus, comme on le fait dans les pays de l'Est, l'amour de la patrie, du travail, mais le laxisme, l'indiscipline, le non-respect des vertus anciennes, la recherche des paradis artificiels. En un mot ce que j'appelle "l'ordre inverse". (Alexandre de Marenches, Dans le secret des princes, Ed. Stock, 1986, Pp. 376-377)
    • Annie Lacroix-Riz en donne une démonstration marquante dans Le choix de la défaite - Les élites françaises dans les années 1930, Armand Colin, 2e édition, 2010
    • « Le jour viendra […] et peut-être bientôt où il sera possible de faire la lumière sur les intrigues menées chez nous de 1933 à 1939 en faveur de l’Axe Rome-Berlin pour lui livrer la domination de l’Europe en détruisant de nos propres mains tout l’édifice de nos alliances et de nos amitiés. » (Marc Bloch, avril 1944)
    [6] “Effects-based operations are coordinated sets of actions directed at shaping the behavior of friends, neutrals, and foes in peace, crisis, and war.“ in Effects Based Operations – Applying Network centric Warfare in Peace, Crisis and War, Edward Allen Smith Jr., Washington, DC: DoD CCRP, Novembre 2002, Pp 108.
    Né en 1946, le Dr. Smith est retraité de l’US Navy en 1998 puis a été embauché par Boeing en tant qu’analyste senior chargé des opérations réseaucentriques et des EBO.
    [7] A rapprocher de la phrase de Carl von Clausewitz dans "De la guerre", 1832 : « La guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens ». Cet auteur est d’ailleurs mentionné dans Effects Based Operations – Applying Network centric Warfare in Peace, Crisis and War, op.cit., Pp 103 : “They are what good generals, admirals, and statesmen have always tried to do: to focus on shaping the adversary’s thinking and behavior rather than on simply defeating his forces. They are at the heart of the writings of Sun Tzu and of Clausewitz on military operations.”
    [8] Il est intéressant de rapprocher cette conception du slogan « La Guerre, c’est la paix » mentionné dans le très célèbre roman « 1984 » de G. Orwell, paru en 1949. Dans cette œuvre il est l’un des mantras du Parti totalitaire au pouvoir ainsi mais c’est aussi le titre d’un chapitre du livre interdit par le Parti de l’Engsoc « Théorie et pratique du collectivisme oligarchique ».
    [9] Conscience Sociale, 2014/03/17 ; Conscience Sociale, 2014/03/10.
    [10] « Une armée est victorieuse si elle cherche à vaincre avant de combattre ; elle est vaincue si elle cherche à combattre avant de vaincre. » Sun Tzu, "L’art de la guerre".
    [11] Conscience Sociale, 2014/03/15.
    [12] Les guillemets de l’auteur indiquent le sens orwellien pour ce terme.
    [13] PressTV, 22/03/2016.
    [14] Parmi les premières révolutions non-violentes citons le renversement du dictateur Jorge Ubico au Guatemala en 1944 et la Révolution des Œillets au Portugal qui a entraîné la chute de la dictature salazariste en 1974.
    À la différence des soulèvements populaires pacifiques précédents, d’autres révolutions, à l’instar des révolutions de couleurs sont davantage inscrites dans une logique géostratégique. L’implication des puissances occidentales, notamment des États-Unis, sont souvent mis de l’avant. On peut citer pour les plus anciennes : Solidarność en Pologne et la Révolution de velours en Tchécoslovaquie.
    Les révolutions de couleur désignent une série de soulèvements populaires ayant causé des changements de gouvernement entre 2003 et 2006 en Eurasie et au Moyen-Orient : la Révolution des Roses en Géorgie en 2003, la Révolution orange en Ukraine en 2004, la Révolution des Tulipes au Kirghizistan en 2005 et la Révolution du Cèdre au Liban en 2005, ainsi que tous les mouvements du Printemps Arabe depuis 2010.
    L’histoire de ces révolutions de couleur suivies par l’expansion orientale de l’OTAN et de l’Union Européenne est une excellente illustration des EBO.
    [15] Voir cette interview et cette biographie.
    NDA : Cette production des États-Unis est l’une des technologies réseaucentriques.
    [16] Révolution de 2005révolution d’avril 2010, violences de juin 2010.
    [17] Global Research, 30/03/2016 ; Voltaire Net, 21/05/2011.
    [18] Sputnik, 31/03/2016. Notons également le passage suivant dans Effects Based Operations – Applying Network centric Warfare in Peace, Crisis and War, op.cit, Pp. 419 :“The creation of a stable deterrence/reassurance regime may involve prolonged successions of these action-reaction cycles over a period of years and even decades.

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    Mises à jour
    4/04/2016 19:50 : complément de bibliographie [5b] sur la guerre hybride
    22/05/2017 : complément de bibliographie [5c] sur la guerre hybride
    30/05/2017 : compléments de bibliographie [15] sur Gene Sharp et [5b] sur Le modèle de la révolution de couleur: le cœur du mécanisme

    A propos de l’auteur :
    Le Dr Bruno Paul est le fondateur et directeur des études de Conscience-Sociale.org, qui est un producteur culturel autonome pratiquant la transdisciplinarité et développé depuis 2008.
    Il s’agit d’abord de contribuer à éclairer le sens à toutes les échelles de décision, du citoyen jusqu’aux parties prenantes dans les relations internationales. Voici notre manifeste.