2012/07/12

How good are economists at forecasting the future ?


CBO economists certainly deserve a special award :

(clic to enlarge)

Source : US Treasury

You may also read "How good are economists at forecasting CPI ?" (Reuters, 2009/06)





2012/07/11

Les barbares financiers


Les financiers aiment se représenter en classe sociale très supérieure, une jet set bien au dessus des autres mortels. On leur invente des termes qui les isolent socialement, pour mieux les démarquer : on les appelle les working rich.

Pourtant les autres gens leur trouvaient bien des défauts, et notamment sur leur déficience morale. Des comparaisons cliniques avec les profils de psychopathes patentés ont déjà été dressées, sans compter que certains économistes comme Roubini commencent à évoquer la nécessité d'en lyncher un.

En plein scandale du Libor, connu des spécialistes depuis au moins 10 ans et qui ne sort qu'aujourd'hui aux yeux du grand public (donc encore un signe que la crise est un dévoilement, une chute du monde d'avant), voici publiée une nouvelle approche de ces déviants sociaux, qui présente l'intérêt d'être statistique et par auto-évaluation des concernés. On apprend ainsi que :
  • 24% des dirigeants de Wall Street et de la Bourse de Londres estiment que des conduites malhonnêtes ou illégales sont nécessaires pour réussir dans le monde de la finance (22% aux US, 25% au UK),
  • 16 % d'entre eux ont admis qu'ils n'hésiteraient pas à commettre un délit boursier, tel que le délit d'initié s'ils pouvaient s'en tirer sans poursuites,
  • 39 % des cadres interrogés estiment que leurs concurrents ont déjà pratiqué des activités illégales ou malhonnêtes (40% aux US, 36% au UK),
  • 30 % d'entre eux affirment que leurs salaires ou leurs bonus les poussent à enfreindre le code de déontologie (28% aux US, 32% au UK), et 23% affirment que d'autres pressions s'exercent pour qu'ils le fassent (19% aux US, 26% au UK),
  • 41% des interrogés seulement affirment qu'il est tout à fait certain que leur staff n'a pas eu besoin d'employer des pratiques non éthiques ou illégales pour gagner (43% aux US, 39% au UK),
  • Seulement 55% des interrogés affirment qu'ils ne commetraient pas d'activités illégales ou non-éthiques pour gagner 10 millions de $, 
  • 30% seulement des interrogés estiment que la repression des crimes financiers par la SEC/SFO est efficace (26% aux US, 34% au UK),
  • 14% des interrogés affirment qu'ils subiraient des répercussions négatives de la part de leur employeur si ils dénonçaient formellement un cas de violation de la loi ou de l'éthique; seulement 35% estiment certain que leur employeur ne le ferait pas.
Il ne s'agit pas de s'effaroucher devant ces chiffres, mais bien de comprendre que cette industrie est tellement gangrénée par les déficiences morales qu'il est impossible qu'elle reprenne d'elle même le droit chemin et abandonne ses mauvaises pratiques. Toute transformation sociale efficace dans ce groupe ne pourra venir que d'une pression accrue de l'extérieur, qui passe tout d'abord par un remplacement complet et rapide de tous les cercles dirigeants, dans tout cet écosystème. Inutile de dire que nous en sommes encore très loin. La conclusion sur laquelle nous devons donc nous appuyer pour anticiper les évènements à venir c'est que ces pratiques vont perdurer et encore davantage se renforcer, car elles s'apparentent à de la prédation nuisible. A la différence d'un parasite, un nuisible ne s'arrête jamais de lui même de dévorer. Il est insatiable.  Mais il n'est fort que parce que son hôte le laisse faire. Le système social évolue donc par à-coup brusques, et non pas par régulation continue et progressive. 
Au delà d'actions individuelles sporadiques, la première étape sociale à surveiller est la montée en puissance de la notion de crime financier dans le droit, et des retorsions effectivement entreprises. La deuxième étape est l'appui sur ce droit pour établir des barrières géographiques sur les flux financiers (ce qui est techniquement très aisé à réaliser), et sur l'éjection de certaines entreprises au delà de ces frontières, par décret. Socialement, le banissement est une solution bien plus efficace que le lynchage. Une forme plus temporaire est l'ostracisme, qui est lui aussi un mécanisme d'auto-défense populaire, un vote de défiance politique.

Sources de l'étude
Tricher est nécessaire selon 24 % des cadres de Wall Street et de la City, Le Monde, 07/2012

2012/06/29

How long does it take to build federalism ?


 A brief reminder about U.S. history  teachs us building federalism took 14 years, with a military war as a booster for this process :

Tensions between American colonials and the British during the revolutionary period : 1760s and early 1770s.

American Revolutionary War : 1775 to 1781. 
  • The Continental Congress established a Continental Army under the command of George Washington : June 14, 1775
  • The Congress adopted the Declaration of Independence : July 4, 1776.
  • After the British defeat by American forces assisted by the French and Spanish, Great Britain recognized the independence of the United States: 1781

The Articles of Confederation established a weak confederal government that operated from 1777 until 1789.

Those wishing to establish a strong federal government with powers of taxation organized a constitutional convention in 1787. 

The United States Constitution was ratified in 1788.

The new republic's first Senate, House of Representatives, and president —George Washington— took office in 1789.

These steps and speed have to be compared with similar current EU federalism process and speed, with currently a monetary war as a booster. This process is the birth of the new Euroland sovereign. Humans are not born in a single minute, and a new sovereign entity is not born in a single year, even taking into account the pregnancy or gestation period.

2012/06/19

Atterrissage d'urgence

 Le projet Conscience Sociale trouve ses racines dans la conviction partagée début 2005 de la bulle immobilière occidentale et de sa dimension sociale. Nous maintenons depuis lors une veille constante sur ce sujet. 

Le mois dernier nous avons souligné sur les réseaux sociaux le grand intérêt du livre de Sylvain Péritel et Philippe Schneider " 2015 : La grande chute de l'immobilier occidental" paru aux Editions Anticipolis. Un travail tres fouillé, très dense, qui va beaucoup plus loin qu'une étude d'économétrie, avec des propositions de politiques publiques très argumentées. Beaucoup d'exemple très concrets, 4 pays passés à la loupe plus 3 zooms inédits sur l'Europe Centrale, forment un contenu particulièrement attractif. En résumé : une anticipation politique de grande qualité et une forte contribution à un débat public majeur !

Ces propositions de politiques publiques vont dans le même sens (en étant plus précises) que celles redigées par Mickaël Mangot ( Les Générations Deshéritées , février 2012) que je recommande également, mais ce dernier s'il se limite à la France, n'aborde pas seulement l'immobilier, ce sont donc des ouvrages complémentaires.

Enfin, dans aucun des 2 ouvrages (notamment la section "Comment éviter une nouvelle bulle"), je n'ai pas vu mentionné la nécessité d'apporter plus de transparence au marché immobilier : les bases des prix des notaires devraient être disponibles sur internet avec un délai de 15 jours après la signature de l'acte final, anonymisés, et faciliter la recherche et la comparaison des prix pour des biens similaires dans une zone donnée. Les services dans cet esprit qui existent aujourd'hui sont tres partiels et partials, ou présente un délai de publication trop grand.

Ce mois-ci, témoin de cet apport accru de transparence, un nouvel indicateur graphique nous est apparu dans l'irremplaçable publication mensuelle de Jacques Friggit




Nous pouvons constater :
  • que si l'on se réfère au montant total des ventes, la bulle de 2001-2008 s'était entièrement dégonflée avant de commencer à se reformer
  • que c'est entièrement faux si on se rapporte au nombre de ventes
  • que la hausse spectaculaire des prix 2001-2008 s'est accompagnée d'une baisse continue du nombre de ventes, qui contraste avec le mythe de "tout le monde achète" dont on nous a constamment rebattu les oreilles. En 2008, au sommet de la bulle on est déjà à des plus bas historiques en terme de nombre de ventes (avant la dégringolade qui a suivie). Encore une fois, on a fait exprès de confondre : "je donne envie à tout le monde d'acheter" avec "tout le monde achète". Ce qui veut dire aussi que de plus en plus de gens se sont trouvés exclus de la propriété à cause de l'envolée des prix
  • que la baisse des prix entre 2008 et 2009 ne s'est pas accompagnée d'une remontée du nombre de ventes, au contraire la baisse s'est accentuée : il faut mettre cela en rapport avec la baisse du pouvoir d'achat des ménages qui s'est encore dégradée pendant cette période, ainsi que leur confiance en l'avenir, confiance qui a commencé à se rétablir mi-2009 (mais reste très loin du compte). Une partie des acheteurs potentiels a peut-être aussi préféré attendre pour bénéficier d'encore plus de baisse, mais dans ce cas c'est une attente volontaire et non subie donc le désagrément est faible
  • qu'au moment où les prix connaissent en 2012 une nouvelle tendance forte à la baisse, le nombre de ventes est toujours 20% plus bas que sa tendance longue, et encore inférieur au creux qui a suivi la mini-bulle de 1991.
Au final, si la marque d'une bulle immobilière se trouve bien dans le niveau des prix, le "bon niveau de prix à atteindre" c'est bien quand le nombre de ventes retrouve son couloir de tendance longe. En effet, c'est alors le signe d'un équilibre retrouvé entre demande et offre de logement, où le marché du logement n'exclut pas davantage de personnes de l'accès à une nouvelle propriété. L'implicite ici consiste à ne pas remettre en cause les habitudes modernes de mobilité immobilière (en moyenne un foyer change de logement tous les 7 ans). Mais ce n'est pas un impératif de société, bien au contraire. Le dégonflement nécessaire des bulles immobilières occidentales, si il s'étale sur la durée, pourrait changer bien des comportements en matière d'acquisition de logements. Nous ne sommes pas non plus à l'abri d'une rupture du marché immobilier encore plus brutale qu'en 2008. La tournure des évènements qui se jouent actuellement dans la poudrière du Moyen-Orient (embrasement Syrie-Iran-Arabie Saoudite-Israël-Palestine-Irak-Afghanistan sans compter les Etats satellites et les puissances mondiales en arrière plan) peut produire cet effet. Je vous conseille vivement la lecture du dernier Global Europe Anticipation Bulletin à ce sujet.

2012/05/25

La démocratie scientifique comme réponse à la crise scientifique

 Pour faire suite au débat engagé avec Anonyme à propos de mon précédent article sur la crise scientifique en cosmologie, je voudrais étendre au domaine scientifique ce qu'a récemment écrit le professeur Jean Gadrey à propos d'une crise similaire faisant rage dans la discipline de l'économie
Le débat, de nature collective, devrait selon moi se dérouler d’une part au sein des associations de scientifiques, d’autre part dans tous les lieux, services publics, médias et associations où la démocratie scientifique et l’information scientifique sont considérées comme des biens communs à défendre.
Je crois pour ma part que les principales questions s’expriment moins en termes de conflits d’intérêts (bien que cette question reste à débattre) qu’en termes de PLURALISME, DE CONNIVENCE ET DE FORMATION DES CROYANCES SCIENTIFIQUES. Elles relèvent de la sociologie, des sciences politiques, de la philosophie morale et politique, de l’éthique professionnelle, plus que du droit et de la science.

Voilà éclairci le fondement de ma démarche, que l'on retrouve également poussée par la fondation Sciences Citoyennes.

Ajout le 11/06/2013:
Automne 2011.
"Conclusion: Science as politics
Beyond the specificity of the institution studied, the EHESS, we find here some scientific processes characterized by a kind of generality. We can see that local paradigmatic change is a violent social process that breaks down the traditional reciprocity of social exchange. Asymmetric relations and exclusion are at the heart of these dynamics, and it is more about transforming existing legitimacies than settling scientific disputes. The more radical the change is, the more likely new entrants will have to build their legitimacy through some kind of detour at the borderlines of other fields in order to transform value into different forms that could make sense in other fields and, in return, support their strategy within their own field. Possession of international capital is not the least advantageous building block for the construction of robust scientific strategies.
The study also documents the fact that scientific life in general and, moreover, paradigmatic change are not only a question of truth, of evidences, and of proofs but also of politics. Evaluating, influencing, building coalitions, voting, and selecting are regular practices both within disciplines and in wider interdisciplinary arenas when articles are submitted, grants are distributed (Lamont, 2009), positions are opened (Musselin, 2005), and candidates are selected. The importance of votes or of quasi-votes enables us to view science as politics. But this brand of politics is special, as we find no left-wing axis and no natural median voter. "