2011/11/01

Google Reader's survival kit

Google has revamped his RSS Reader today.
The most disturbing choice, apart from the awful new low constrast grayed unique look & feel, is the immediate interruption of Reader sharing service, now fused with Google Plus... but this one does not even offer a RSS output ! Is it a dead end for automatic sharing ?
And your Google Reader's shared items list has disappeared :(

Here is some tricks to let you share again with :
  • clik on +1 at the bottom of an article in GReader, or use "share on Google+" button if you are using SGplus extension
  • Click into the comment zone then Share button : this link is shared into your G+ Stream
  • convert your Google+ Stream into a RSS feed : use Yahoo's Dapper for that, and choose the RSS feed export format. Use your own stream URL (https://plus.google.com/your_id/posts), select successively the 2 correct zones in the shown page to record the title and then the text content of your new feed. You will group them together in a subsequent step. The whole procedure is somewhat long but the result is ok.
  • be sure to click on  "update service" blue button located in the right at the last step; 
  • copy the resulting (very long) RSS link displayed with the small RSS icon at the right bottom 
  • in Google Reader, use the subscribe button and paste your URL, click ok.
  • an empty item list could be displayed ; don't take care and look for the name of your RSS at the end of the RSS list (left panel). Click on it : the correct item list of your shared feed should be displayed !
About the RSS feed associated with your labels, now they can only be found with a clic on the small arrow near the label (left panel), then "view details and statistics".

Ouf !

2011/10/27

Les 2 prix du pétrole

 La dislocation du monde depuis le début de la crise vaut aussi pour le prix du pétrole. Il est néanmoins frappant de constater à quel point, ainsi que de voir que personne n'en parle, ou alors en terme de simple "anomalie transitoire". La FTC ne semble enquêter que sur les fluctuations de prix et la suspicion de leur manipulation, et moins sur les écarts entre index.

Commençons par regarder les 2 index principaux de ce marché du pétrole, depuis 1 an glissant: à ma gauche le WTI Crude, et à ma droite le Brent Crude.


Alors que l'historique de ces index montre habituellement un écart d'environ 1%, depuis fin février 2011 le WTI a dérivé en quelques semaines pour se situer 20 à 25% moins cher que le Brent. Alors que le Brent persiste depuis cette date au-dessus du palier de 100$, le cours du WTI cherche à s'en éloigner. C'est un comportement extraordinaire pour deux matières premières aussi similaires (et ceci même si l'on compare des bruts avec des densités API équivalentes), si on croit aux vertus des marchés "purs et parfaits" !
Outre l'écart des prix de ces index, c'est bien aussi la durée de persistance de cet écart qui doit être expliquée - si vraie explication il y a, c'est à dire si elle est communicable en toute transparence. Vu le silence assourdissant des spécialistes en place qui se bornent à dire que "le WTI a perdu son statut d'index de référence", nous pensons au contraire que c'est une affaire d'opacité, d'occultation, et qu'il ne faut pas attendre d'explication que l'on ne soit pas allé chercher soi-même.
Cherchons des similitudes: à quoi raccrocher l'index WTI? Aux USA, d'après la définition donnée par Wikipedia. On peut alors s'intéresser aux autres index des bourses au pétrole dans le monde
(note: cette page de l'EIA a ensuite été modifiée en 2012 et ne fait plus apparaître les informations, mais on peut trouver une archive. La nouvelle page (également ici) ne fait désormais apparaître qu'une petite "sélection" de bruts. Remarquons aussi que de nombreux prix, même si ils datent d'une année, sont "Withheld to avoid disclosure of individual company data". On appréciera ici la transparence du marché du pétrole, qui est pourtant une caractéristique essentielle au concept de marché).

Et on remarque immédiatement que :
  • la plupart des index évoluent avec une faible différence entre eux, sur toute la durée de l'historique, y compris par rapport à la moyenne de l'index composite de l'OPEC. Les variations plus importantes, dues à des ruptures logistiques, ne durent pas.
  • les seuls index présentant un autre comportement sont ceux du Canada, et du Mexique
  • et ces derniers présentent cet écart exactement depuis juillet 2008, date du plus haut sommet des prix du pétrole, avec une tendance nettement accélérée depuis fin février 2011 :


note: Ces images ont ensuite été retirées du site web de l'EIA en 2012. Je les remplace par les copies suivantes, mais qui ne présentent l'historique que jusqu'à fin 2008. Cliquez sur le lien pour voir l'historique complet de chaque index. ]

Mexico Maya Spot Price FOB (full history with monthly data)



Canadian Par Spot Price FOB (history of Lloydmonster prices with monthly data)
(cliquez pour agrandir)

Ces 3 index représentent une partie très importante (28%) de l'approvisionnement en pétrole brut des USA. Le Canada est le premier fournisseur de pétrole des USA en volume, et le Mexique le 3ème. A cette part il faut rajouter la production locale des USA, au prix du WTI, équivalente à 60% des importations de pétrole brut. La facture pétrolière des USA est donc d'au moins 20% plus faible que s'ils se fournissaient au prix normal du spot, comme les autres pays. Pour un cours moyen à 100$ le baril cela représente une économie d'environ 107 milliards USD par an en ne comptant que le pétrole brut, au détriment en partie des revenus du Canada et du Mexique. Ces distorsions du marché permettent d'amoindrir les hausses du prix à la pompe, et une inflation qui reste galopante dans un pays aussi consommateur :

 (cliquez pour agrandir)

On peut donc bien définir deux zones géographiques qui partagent le monde, chacune avec un prix du pétrole sensiblement différent. L'Amérique du Nord d'un côté avec un prix artificiellement bas, et de l'autre côté le reste du monde avec un prix sensiblement plus élevé. Et on comprend que, apparue lors du franchissement de la barre symbolique des 3$ le gallon, "l'anomalie" du WTI ne va pas disparaître puisqu'il s'agit de maintenir par ce biais gigantesque le prix à la pompe le plus bas possible. Ceci expliqué, vous pourrez regarder les jolies explications de l'EIA d'un autre oeil.
(Note: depuis ce billet, l'EIA - qui consulte Conscience Sociale - diffuse des informations complémentaires tous les deux mois sur les prix)

Mise à jour 6/1/2013 :
ajouts des notes, MAJ des liens et images

Mise à jour 28/6/2013 :
suivi du spread BRENT-WTI au quotidien (en %, échelle de droite; échelle de gauche: prix du WTI) :



2011/10/17

Qui vend en masse des Bons du Trésor US ?

 A la suite de notre article sur l'Operation Twist Redux de la Fed, nous continuons à nous intéresser au marché des bons du Trésor US. Au delà de la valeur nominale de ces bons, il est désormais plus intéressant de suivre qui les détient, et qui les vend. Voici deux index à suivre très attentivement dans les semaines et mois à venir, qui mesurent le volume des Bons détenus par des investisseurs étrangers :

Depuis la semaine du 24 Août cet index est en chute libre, ce qui représente une baisse d'une ampleur encore jamais observée auparavant, comme en témoigne ces graphiques (cliquez pour mieux voir):

Historique de l'index sur 3 mois : 
baisse de 2.8% de sa valeur entre le 24 Août et le 17 octobre

Historique de l'index sur 1 an glissant
 (mise à jour de l'image toutes les semaines)

Historique de l'index sur 5 ans, jusqu'au 17 octobre 2011. 
Le point d'inflexion marque la faillite de Lehman Brothers le 15/09/2008.

Historique depuis 1989 (plage maximum disponible auprès de la Fed pour cette statistique), en milliards de USD

Historique depuis 1989 exprimé en milliards de USD de variation hebdomadaire

  • Par ailleurs la même baisse se retrouve dans l'index "US Marketable Securities Held in Custody for Foreign Official & Intl Accounts" (FARBTOTL:IND ou directement sur le site de la Fed), depuis exactement la même date du 24 Août :
Historique de l'index sur 1 an glissant 
(mise à jour de l'image toutes les semaines)

Historique maximum disponible auprès de la Fed pour cette statistique

Historique exprimé en milliards de USD de variation hebdomadaire

En parrallèle, on peut observer un accroissement très rapide de la valeur "(d) securities lent and on repo, Section IV" publiée par la Fed dans ses bilans hebdomadaires : U.S. International Reserve Position. On sait donc qui achète, mais qui vend ? Pour en être certain il va falloir un peu de patience et attendre la mise à jour de cet historique mensuel de la Fed : MAJOR FOREIGN HOLDERS OF TREASURY SECURITIES. (historique 1, historique 2)

UPDATE 10/26 : 
Casey Research published today a very similar blog post, with very similar graphics and conclusions : 
Foreigners Losing Confidence in Holding US Treasury and Agency Debt

2011/09/27

Operation Twist Redux revisited

 Fed's last operation Twist Redux is one of those events which cause immediately brutal movements on the markets (over reacting), but can only be analyzed a few days afterwards.
Some bloggers are willing to see an offensive monetary policy behind this operation, targeted towards all others majors currencies at the same time : "risk-off" strategy, reversal of carry trade, capital inflows, commodity deflation, and we can even read "king dollar is back".

Some facts are important to remember :
1) original operation Twist I (aka Operation Nudge, 21 Feb 1961-1965) was a defensive experiment for improving US balance of payments because US had to sell gold at an unsustainable rate.  
3) the Fed’s QE2 programme was comparable in size, at around 4% of total Treasury and agency-backed debt. It allows a 28% stock rally during few months, but without noticeable positive effects on Main Street, unemployment and foreclosures. Inflation was allowed to growth, too.
4) another Twist-like operation was run by the Fed... in 2009. Results are known : Wall Street rally but Main Street problems became bigger and deeper. The crisis became more and more a social one.
5) One of the most noticeable movement this time was gold and silver go down.
But if gold market was down during 2 days in a row, it only reached back to 11 August 2011 price level :

source: goldprice.org (clic to enlarge)

Gold price remains since 1971 a very significant trend. Operation Twist II has not changed this in any way. And you can see since 9/27 gold price is up again.

We may see a rally on Wall Street stocks. But like in 60's and in 2009, Fed's last quantitative easing programme will not produce any change in the real world, either for Main Street (commodities, unemployment, down lifestyle), and for inflation in US. Stay tuned to the gold market to verify this day after day, specially during 2012 election campaign.

2011/07/23

Le S de BRICS doit nous inspirer

 Ce S désigne l’Afrique du Sud bien sûr. L’Egyptien Serageldin a introduit son dernier discours “The Making of Social Justice: Pluralism, Cohesion and Social Participation” à Johannesburg par ces mots :

"Apartheid was the epitome of social injustice, and its overthrow was a great moral victory for freedom, equality and justice.  The light shining from South Africa has finally reached the northern part of the continent."
Après avoir lu son discours, vous pourrez ici pour vous replonger dans la récente histoire de ce pays, qui a vu l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela. Dans un pays socialement au bord du gouffre, cette transition s’effectue sans les atrocités qui accompagnent le plus souvent les révolutions. Comment cela a t’il pu se produire ? N’y a t’il pas des leçons à en tirer pour notre présent, dans un contexte de transition démographique dans de nombreux pays ? Voilà les questions à l’origine de ce texte, rédigé fin 2009 et que je publie aujourd’hui.

Une anticipation politique rétrospective: la fin de l’Apartheid en Afrique du Sud pouvait-elle être anticipée ?

Nous retenons comme définition de l’Apartheid celle de «développement spatialement séparé», donnant un contenu géographique strict à une politique de discrimination raciale apparue dès le Land Act de 1913, puis largement développée et renforcée par le Parti National à partir de 1948.
La date précise de la fin de l’Apartheid ne fait pas consensus. Ici, puisque l’Apartheid est avant tout l’expression d’une politique, nous choisissons de retenir la date du 5 Juin 1991, quand le Parlement a abrogé les Land, Group et Population Registration Act.
Ce fait établi de manière formelle la volonté de changement de politique.
Nous n’avons pas retenu les dates du 11 février 1990 (libération de prison de Nelson Mandela), celle du Prix Nobel de la paix le 15 Octobre 1993 pour Mandela et De Klerk ou celle des premières élections multiraciales des députés à l’Assemblée Nationale et de la dissolution des bantoustans le 27 avril 1994, et qui vit la victoire de l’African National Congress (ANC). Ces députés ont ensuite élu le 9 mai 1994 Nelson Mandela à la présidence de la République.
La fin de l’Apartheid est clairement un processus qui s’est étendu sur plusieurs années, et qui d’une certaine façon continue encore de nos jours : « depuis 1994, seulement 3,6 % des fermes ont été redistribuées aux 1,2 million de noirs alors que 60 000 blancs possèdent et gèrent toujours 80 % des surfaces cultivables. Le gouvernement s'était donné en 1994 comme objectif de redistribuer 30 % des terres d’ici 2014. » (1)
La façon dont il s’est dénoué après 1991 n’est certes pas du au hasard, mais ce n’était qu’une voie possible parmi d’autres, beaucoup plus chaotiques, mais qui aurait toutes conduit à la fin du développement géographiquement séparé entre ethnies.
Nous retiendrons donc en particulier dans notre analyse les faits et évènements antérieurs à juin 1991, ou les données applicables à cette période. Pour une brève chronologie des évènements historiques ultérieurs, le lecteur pourra se reporter aux références 1 et 2.
Nous nous proposons d’analyser à la fois le Comment, c'est-à-dire l’analyse rétrospective des données de court ou moyen terme internes à l’Afrique du Sud qui pouvaient être utilisées pour anticiper la fin de l’apartheid, mais aussi commencer par le Pourquoi, c'est-à-dire à éclairer les tendances de fond et les interactions avec les autres nations, et en particulier la géostratégie, la géopolitique et la géoéconomie.

Synthèse géopolitique et géostratégique de l’Afrique du Sud avant 1991

La géopolitique doit évidemment prendre en compte les évènements suivants :
  • la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989 et l’effondrement très rapide de l’URSS
  • l’indépendance le 21 mars 1990 de la Namibie
  • l'invasion du Koweït par l'Irak à partir du 2 août 1990, et le début de l’offensive militaire des Alliés contre l’Irak le 16 janvier 1991
Le conflit depuis 1945 entre les USA et l’URSS avait donné lieu en Afrique australe à une position bien définie :
  • Une alliance de l’Afrique du Sud avec les USA au moins jusqu’en 1975
  • L’Afrique du Sud comme puissance régionale, avec une influence stratégique sur ses voisins : le Botswana, le Zimbabwe, le Mozambique, la Zambie, le Malawi et au nord la Tanzanie (Madagascar restant isolée des affaires continentales) c'est-à-dire hors de la « diagonale du vide » et de la sphère d’influence de la Françafrique. Cette influence se concrétise dans la main mise de l’Afrique du Sud sur toutes les principales lignes de chemin de fer dans l’Afrique Australe (1, et Atlas Geostratégique 2009, Diplomatie HS 10), contrôlant ainsi tous les acheminements de matières premières dont la région est particulièrement riche (or, diamant, uranium, métaux mais aussi pétrole & gaz…) vers les ports des différents pays.
  • L’Angola comme seul pays résistant durablement à l’influence régionale de l’Afrique du Sud (1)
  • Un soutien marqué du bloc soviétique en Angola depuis 1975 (via notamment les 55000 militaires envoyés par Cuba)
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La crise Angolaise entre le MPLA au pouvoir, l’UNITA et leurs soutiens étrangers respectifs va connaître un dénouement historique le 15 novembre 1988 à Genève, par un accord entre Angola, Afrique du Sud, USA et Cuba, suite aux avancées du 20 Juillet et de l’accord de paix du 22 aout 1988 entre l’Angola et l’Afrique du Sud (1). C’est cet accord qui prépare le terrain pour l’indépendance de la Namibie en 1990, laquelle était jusqu’alors une province administrée par Pretoria. Bien que les USA aient aidé l’UNITA à partir de 1986, ils vont faire pression sur l’Afrique du Sud pour accepter l’’indépendance de la Namibie en échange du retrait des troupes Cubaines.
Au chapitre des causes de cet accord, on peut dire que si l’URSS avait fait la preuve en 1975 de sa réelle capacité à se projeter militairement (avec Cuba) loin de ses bases (et pour la première fois dans un pays du Tiers Monde), cet accord de 1988 souligne la volonté de l’URSS de se désengager de ses positions lointaines… un prémisse parmi d’autres de la chute du Mur de Berlin.
Au chapitre des conséquences de cet accord, on peut dire que les USA en sortent vainqueurs :
  • les importations d’Angola vers les USA ont été multipliées par presque 2,9 entre 1988 et 2000, et encore par 5,3 entre 2000 et 2008 (1). En 2008, l’Angola fournit 4,5% du total du pétrole importé par les USA, presque autant que l’Iraq et seulement 2 fois moins que l’Arabie Saoudite (1).
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  • Les premières lois à être votées par les nouveaux régimes en Angola et en Namibie concernent les exploitations de matières premières (taxes, concessions et royalties). Les concessions de prospection de pétrole et de gaz ont été attribuées en Namibie aux compagnies américaines, néerlandaises et d’Afrique du Sud en premier lieu (1, 2).
  • La mise en production de la mine d’or de Navachad en 1989 en Namibie (identifiée depuis 1984) a dès 1990 permis de produire régulièrement plus de 2 tonnes d’or par an (davantage que la production actuelle de la Guyane française, 53ème producteur mondial) (1, 2). Les sociétés propriétaires d’origine étaient Erongo Exploration and Mining Company (une filiale de Anglo American Corporation dont le siège est à Londres et les principaux actionnaires sont des banques américaines telle JP Morgan Chase ; 70 %), Metal and Mining Company of Canada (20 %) and Rand Mines Exploration Company (Afrique du Sud ; 10 %). (3, 4, 5)


De la géopolitique à la politique intérieure : du pourquoi au comment

Quelques coïncidences vont venir accélérer le cours de l’histoire (1) :
  • Le ministre sud africain des affaires étrangères, Pik Botha, voit les billets d’avion sur le vol Pan Am 103 pour New York de sa délégation non confirmés au dernier moment. La délégation échappe ainsi à l’attentat de Lockerbie, et rejoint le siège de l’ONU à New York par l’avion précédent pour la signature officielle de l’accord tripartite le 22 Décembre 1988.
  • Le 18 Janvier 1989, le président sud Africain, PW Botha subit un infarctus qui l’empêche d’assister à la réunion du 20 janvier avec les Namibiens à laquelle il se fait remplacer. Il revient aux affaires le 1er Avril 1989 quand la résolution 345 des Nations Unies (période de transition de 11 mois de la Namibie vers l’indépendance) entre en vigueur officiellement.
En septembre 1989, Botha est contraint à la démission. Le premier ministre Frederik De Klerk est élu président. Il amorce immédiatement l’abandon du régime de l’apartheid. Le 2 février 1990, les partis ANC, PAC et le parti communiste (SACP) sont légalisés de nouveau. (1)
On remarquera aussi que Nelson Mandela, libéré le 11 février 1990, fait son premier voyage à l’étranger le 13 juin à New York, le 16 juin à Amsterdam et le 20 il retourne à New York (1).
En aout 1990 le gouvernement rencontre l’ANC, plus modéré que l’Inkatha Freedom Party (IFP) et demande la nomination d’un nouveau gouvernement et d’une nouvelle constitution assurant une voix pour chaque citoyen. Toutes les lois raciales relatives à la vie quotidienne des individus ( Separate Amenities Act) sont abrogées au mois d'octobre 1990 (1). Le 1er février 1991, de Klerk annonce au Parlement des réformes majeures, et notamment l’annulation des Land Acts de 1913 et 1936. (1)

Synthèse géoéconomique de l’Afrique du Sud avant 1991

On ne peut pas évoquer l’Apartheid sans mentionner le rôle joué par les sanctions économiques d’un certain nombre de pays envers l’Afrique du Sud, à la suite du fort mouvement de protestation qui ont animés leurs sociétés civiles, lequel faisait suite aux violentes répressions répétées des émeutes en Afrique du Sud, en particulier depuis 1976.
Les sanctions contre l’Afrique du Sud ont commencé à l’initiative des pays africains (Defiance Campaign). Leur effet a été nul du fait du faible poids économiques de ces partenaires.
Les sanctions économiques ont pris un nouvel essor en 1984, par des sociétés privées américaines qui se sont retirées d’Afrique du Sud (90 sociétés en 2 ans). La aussi l’effet sur l’Apartheid a été négligeable.
Est-ce que les sanctions plus importantes prises dans la foulée ont pu avoir une influence sur la transformation politique ?
La plupart des informations trouvées, notamment sur Wikipedia, l’affirment. Cela va dans le sens de la volonté de trouver un effet politique réel de la forte campagne de protestation dans les pays occidentaux. Pourtant l’étude de Hefti et Staehelin-Witt (2003) apporte des éléments beaucoup plus détaillés sur les divers types de sanctions commerciales et économiques, et sur leurs effets sur la politique du gouvernement sud-africain. La conclusion est sans équivoque :
“On ne peut attribuer aux sanctions économiques qu’une modeste contribution au processus, dans le meilleur des cas. De Klerk n’a pas subi, de la part de la population blanche, de pression en vue de céder aux exigences des pays sanctionnants. C’est ainsi qu’une enquête portant sur l’effet des mesures économiques dirigées contre l’Afrique du Sud (autrement dit, outre les sanctions économiques, le blocage des crédits de 1985, lequel a débouché sur la crise de la dette, la campagne de désinvestissement et le boycott par l’étranger de certains produits sud-africains, et en particulier des produits agricoles), a montré qu’en 1989 encore, malgré ces mesures, la population restait opposée à la suppression de l’apartheid. De même, une majorité n’aurait pas voulu céder à des sanctions économiques renforcées.”
Cette affirmation est aussi confortée par l’analyse de l’effet des sanctions sur la fuite nette de capitaux hors de l’Afrique du Sud (1) :
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Les fuites de capitaux en 1985 n’ont pas atteint un seuil très différent des minimums auparavant observés.

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Pourtant cette année a connu la « crise de la dette sud Africaine » (refinancement de la dette court terme du pays) immédiatement suivie par le credit crunch des banques américaines sur les attributions de nouveaux prêts dans ce pays, puis par une loi votée par le Congrès américain. La devise a perdu de sa valeur ce qui a accentué les difficultés économiques du pays. Mais la banque centrale sud africaine a limité les effets en imposant fin 1985 une monnaie virtuelle « le Rand financier » pour les sorties de capitaux par les autres pays. (1, 2)

La démographie de l’Afrique du Sud

Le premier fait frappant dans la société de ce pays réside dans l’hétérogénéité spatiale des ethnies, résultat de longues années de séparation géographique par ségrégation, et inchangée dans les cartes issues du recensement de 2001 (1) :

image

On aurait tort de croire cependant que les groupes ethniques étaient parfaitement séparés. Les données de 1996 montrent qu’il n’y a pas de province où les Blancs soient totalement absents :

Eastern
Cape
Free
State
Gauteng Kwazulu-
Natal
Mpuma-
langa
Northern
Cape
Northern
Province
North
West
Western
Cape
South
Africa
African / 
Black
86.4 84.4 70.0 81.7 89.2 33.2 96.7 91.2 20.9 76.7
Coloured 7.4 3.0 3.8 1.4 0.7 51.8 0.2 1.4 54.2 8.9
Indian / 
Asian
0.3 0.1 2.2 9.4 0.5 0.3 0.1 0.3 1.0 2.6
White 5.2 12.0 23.2 6.6 9.0 13.3 2.4 6.6 20.8 10.9
Unspecified /
Other
0.6 0.4 0.8 0.8 0.6 1.5 0.7 0.5 3.1 0.9
Total 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0
Le deuxième fait marquant est la différence de traitement social que recoivent les diverses ethnies, et qui se traduit par le taux de chomage :


On est donc amené à se poser la question du rapport numérique entre les populations, et leur évolution dans le temps. Il apparaît clairement que la proportion de la population blanche diminue très rapidement, comme déjà noté dans ce rapport statistique de 1986 : « the Whites have shown the lowest growth rate of all the population groups for the last 6 years ». C’est même un effondrement puisque le taux de croissance est divisé par 2 :
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On peut même tracer cette chute dans les données statistiques remontant jusqu’à 1960. Cette tendance continue à être bien présente pour toutes les tranches d’âge de la population (Age distribution in five-year intervals by population group ; données de 1996)

 image

Les colonnes additionnelles notées « P% » indiquent la proportion de la population pour chaque groupe ethnique et ayant moins de 70 ans, moins de 55, moins de 40, moins de 25 et moins de 10 ans. Les blancs passent de 10 à 6 %.
Cette pression démographique à la baisse pour les Blancs, bien qu’elle soit le résultat de plusieurs facteurs (émigration des Blancs à l’étranger surtout après 1991, taux de fécondité plus faible et en rapport avec leur situation socioéconomique, inquiétude due à la criminalité…) ne peut également manquer d’être analyser comme un échec annoncé du développement séparé, et harmonieux, de la société blanche.

Eléments clés de l’anticipation politique

L’influence des USA (et en particulier de ses banques) sur la fin négociée et rapide de l’apartheid a bien été déterminante. En effet la stabilité sociale de l’Afrique du Sud était d’un intérêt national vital pour les USA, pour les raisons géostratégiques, géo économiques et démographiques que nous avons évoquées
La citation suivante résume la doctrine de l’anticipation qu’il était possible de produire avant 1991 :
The U.S. has a vital national interest in preventing a further escalation of violence, confrontation, and economic impoverishment in Southern Africa. If sanctions on investment and trade with South Africa are broadly supported in the Western world, they could trigger catastrophic consequences for the eighty million people in the seven African countries dependent on South-Africa for food, trade routes electricity, and other necessities. In short, sanctions policies that promote further disorder in South Africa could have a profound residual impact of causing the Ethiopianization of all of southern Africa.” (1)


[Annexe 1]

Cette répartition géographique de l’Afrique du Sud a favorisé la permanence de langages multiples :

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South Africa municipalities by language
Lighter shades indicate a non-majority plurality. Data from the 2001 census

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[Annexe 2] Les principales lois d'apartheid

 1949
§ Loi sur l'interdiction des mariages mixtes (Prohibition of Mixed Marriages Act)
1950
§ Loi d'immoralité (Immorality Act) pénalisant les relations sexuelles entre Blanc et non Blanc.
§ Loi de classification de la population (Population Registration Act), distinguant les individus selon leur race.
§ Loi de suppression du communisme (Suppression of Communism Act), permettant d'interdire tout parti politique catalogué comme communiste par le gouvernement.
§ Loi d'habitation séparée (Group Areas Act) répartissant racialement les zones urbaines d'habitation.
1952
§ Loi sur les laissez-passer (Pass Laws Act) faisant obligation aux Noirs ayant plus de 16 ans d'avoir sur eux un laissez-passer en l'occurrence un document ressemblant à un passeport qui stipulait s'ils avaient une autorisation du gouvernement pour être dans certains quartiers.
1953
§ Loi sur les commodités publiques distinctes (Reservation of Separate Amenities Act) ségrégant les toilettes, fontaines et tous les aménagements publics.
§ Loi d'éducation Bantoue (Bantu Education Act), concernant le programme scolaire des Noirs.
§ Retrait du droit de grève aux travailleurs noirs, interdiction de la résistance passive.
1954
§ Loi de relocalisation des indigènes (Native resettlement Act) : permet de déplacer les populations noires vivant en zones déclarées blanches.
1956
§ Loi sur le travail et les mines (Mines and Works Act) formalisant la discrimination raciale dans le monde du travail.
1959
§ Loi sur la promotion de gouvernements noirs autonomes (Promotion of Bantu Self-Government Act) créant les bantoustans sous administration des non Blancs.
1970
§ Loi de citoyenneté des Noirs des homelands (Black Homeland Citizenship Act) retirant la citoyenneté sud-africaine aux Noirs issus de communautés ethniques relevant de bantoustans déjà créés.
1974
§ Décret sur l'Afrikaans obligeant toutes les écoles, mêmes noires, à dispenser en afrikaans tous les enseignements de maths, de sciences sociales, d'Histoire et de géographie du niveau secondaire.
1976
§ Loi sur l'interdiction aux Noirs de l'accès à la formation professionnelle.