2012/05/25

La démocratie scientifique comme réponse à la crise scientifique

 Pour faire suite au débat engagé avec Anonyme à propos de mon précédent article sur la crise scientifique en cosmologie, je voudrais étendre au domaine scientifique ce qu'a récemment écrit le professeur Jean Gadrey à propos d'une crise similaire faisant rage dans la discipline de l'économie
Le débat, de nature collective, devrait selon moi se dérouler d’une part au sein des associations de scientifiques, d’autre part dans tous les lieux, services publics, médias et associations où la démocratie scientifique et l’information scientifique sont considérées comme des biens communs à défendre.
Je crois pour ma part que les principales questions s’expriment moins en termes de conflits d’intérêts (bien que cette question reste à débattre) qu’en termes de PLURALISME, DE CONNIVENCE ET DE FORMATION DES CROYANCES SCIENTIFIQUES. Elles relèvent de la sociologie, des sciences politiques, de la philosophie morale et politique, de l’éthique professionnelle, plus que du droit et de la science.

Voilà éclairci le fondement de ma démarche, que l'on retrouve également poussée par la fondation Sciences Citoyennes.

Ajout le 11/06/2013:
Automne 2011.
"Conclusion: Science as politics
Beyond the specificity of the institution studied, the EHESS, we find here some scientific processes characterized by a kind of generality. We can see that local paradigmatic change is a violent social process that breaks down the traditional reciprocity of social exchange. Asymmetric relations and exclusion are at the heart of these dynamics, and it is more about transforming existing legitimacies than settling scientific disputes. The more radical the change is, the more likely new entrants will have to build their legitimacy through some kind of detour at the borderlines of other fields in order to transform value into different forms that could make sense in other fields and, in return, support their strategy within their own field. Possession of international capital is not the least advantageous building block for the construction of robust scientific strategies.
The study also documents the fact that scientific life in general and, moreover, paradigmatic change are not only a question of truth, of evidences, and of proofs but also of politics. Evaluating, influencing, building coalitions, voting, and selecting are regular practices both within disciplines and in wider interdisciplinary arenas when articles are submitted, grants are distributed (Lamont, 2009), positions are opened (Musselin, 2005), and candidates are selected. The importance of votes or of quasi-votes enables us to view science as politics. But this brand of politics is special, as we find no left-wing axis and no natural median voter. "

 

5 commentaires:

  1. Je comprends ta démarche. Il est peut-être nécessaire de distinguer toutefois les aspects sociétaux de la science (pour qui on cherche?), des aspects individuels (pourquoi on cherche?) et des aspects politiques. La prise d'otage de notions scientifiques par l'émotion pourrait être un frein à ta démarche. Le "yurk factor" par exemple, totalement psychologique, peut conduire à l'exclusion d'une recherche utile. De la même manière que l'argumentum ad populum est une pure manipulation, la recherche sur l'avis du plus grand nombre, sans modération, conduira à étudier des bêtises. Je partage ton avis sur l'importance de l'éthique et de la philosophie. Historiquement philosophie et sciences sont dans la tête des mêmes personnes. Ce n'est que depuis 100 ans que les chercheurs ne sont plus philosophes. de la science sans conscience.

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  2. Tu l'as bien compris Luc, le point de départ est nécessairement une position philosophique. La mienne est anthropologique: l'activité de recherche est nécessairement une composante sociale parmi d'autres. Il ne peut exister de recherche même mathématique sans ce fondement. Car c'est de cette dimension seule que le chercheur tire le SENS de son activité de recherche. Même les supercordistes n'effectuent leur recherche que parce qu'ils sont dans un microcosme social qui leur donne du sens (aussi illusoire soit-il dans ses résultats). Ainsi, il ne faut pas craindre une implication plus grande de la société dans la recherche. Au contraire, elle lui donnera davantage de sens. Le risque "d'exclusion d'une recherche utile" n'est-il pas alors qu'un faux-semblant, qui ignore que c'est le chemin suivi par l'ensemble de la société qui détermine la "recherche utile" ? Par contre je te rejoins sur la nécessité de modération. Toutes les voix ne sont sans doute pas équivalentes au départ. C'est pourquoi je préconise, comme pour la démocratie Agile, d'organiser l'action démocratique autour de think tanks citoyens qui sont les lieux capables de faire éclore une pensée collective détachée de l'émotion, et de lui donner perspective et continuité.

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  3. C'est en effet une méthode honnête. Si l'on fait le parallèle avec la religion, qui fut la première forme, historiquement, de recherche, elle a commencé entre prêtres, dans des sanctuaires fermés, derrière des jubés. Puis le peuple a été impliqué et a pu accéder aux textes et aux sites. Cela n'a pas changé la position du clergé mais le peuple a t il vraiment accédé à quelque chose d'autre qu'une façon nouvelle d'exercer le pouvoir, par l'influence, le soft power, plutôt que la violence politique?

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  4. La discussion se poursuit ici : http://philo.luc.mn/2012/05/speculation.html

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  5. Une autre facette de la nécessaire démocratisation de la science : les plateformes de distribution des publications subissent aussi les coups de boutoir de la révolution Internet. Publication, référencement, validation, distribution, valorisation et protection des droits : tous les sujets sont touchés.

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